24 juillet 2010

La vidéo du discours de Ségolène Royal, en Grèce

http://www.dailymotion.com/video/xe3lvp_les-solutions-alternatives-a-la-cri_news

18 juillet 2010

Sur les alternatives progressistes à la crise du système



Poros, le 13 juillet 2010
Chères amies, chers amis,

Quelques nouvelles de Grèce où je participe à une réunion de travail qui rassemble, quatre jours durant, des responsables politiques de premier plan et des chercheurs de haut niveau autour de la question des alternatives progressistes à la crise du système qui n'en finit pas d'ébranler le monde et, tout particulièrement, l'Europe.
J'y ai été conviée par la fondation Papandreou. Il y a ici des participants de tous les continents, venus pour échanger des idées et des expériences. Une des questions majeures versée aux débats : quel rôle pourrait jouer dans le monde qui vient une Europe capable de surmonter ses divisions et de porter un modèle alternatif de développement ?
En complément des sessions plénières, des ateliers sont plus particulièrement consacrés à la Grèce qui, comme vous le savez, a été la première cible de la spéculation des marchés financiers et a dû s'engager, en contre-partie de l'aide qui a fini par lui être apportée par l'Europe et le FMI, dans un effort draconien d'assainissement de ses finances publiques aux conséquences sociales très dures pour le peuple grec.
Nos travaux ont commencé hier lundi par une séance inaugurale consacrée à l'avenir de l'Europe dans la globalisation, au cours de laquelle j'étai invitée à prendre la parole.
Après l'allocution de bienvenue de George Papandreou, Catherine Ashton, qui est depuis novembre 2009 à la tête de la diplomatie européenne en tant que Haut Représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, a lancé le débat en évoquant ce que sont, de son point de vue, les principaux enjeux d'une affirmation de la voix de l'Europe dans le nouveau monde multipolaire qui émerge.
Ivan Vejvoda, qui dirige la Fondation des Balkans pour la démocratie et a particulièrement travaillé sur les transitions démocratiques dans les pays de l'ex-Europe de l'Est, ainsi que Toomas Hendrik Ilves, Président de la République d'Estonie, nous ont fait part du regard qu'ils portent sur les atouts dont dispose l'Europe pour peser. L'Estonie est un petit pays (1,4 million d'habitants) qui a recouvré son indépendance en 1991, deux ans après la chute du mur de Berlin. Ses performances dans les domaines de l'innovation et des nouvelles technologies de la communication lui ont valu le surnom d'e-stonia. C'est en Estonie qu'a été mis au point le logiciel Skype qui permet de téléphoner gratuitement dans le monde entier, via Internet, et compte aujourd'hui des centaines de millions d'utilisateurs. Le gouvernement estonien est également pionnier de l'administration numérique et du vote électronique. L'Estonie devrait intégrer la zone euro début 2011.
Dans mon intervention, j'ai souligné combien, à mes yeux, l'Europe bousculée par la crise se trouve aujourd'hui à la croisée des chemins : soit nous nous en tenons à cette « gouvernance par défaut » qu'illustrent les limites du Pacte de Stabilité et cédons à la tentation de divisions accrues (dont a récemment témoigné le temps perdu à faire acte de solidarité avec la Grèce durement attaquée par les spéculateurs), soit nous construisons ensemble un véritable gouvernement économique capable d'anticiper, d'impulser, d'accompagner et de protéger afin de faire de l'Europe notre force commune dans un monde où de nouveaux rapports de forces se dessinent et où la finance doit être remise à sa plce. Pour moi, je l'ai souvent rappelé, les Etats-Unis d'Europe constituent l'horizon politique de l'union renforcée dont nous avons plus que jamais besoin pour rester dans la course et l'orienter dans le bon sens. La tentation du « chacun pour soi » est un mauvais calcul car elle fait le lit des populismes locaux et de notre marginalisation collective.
Il ne faut pas, disait-on en 1929, « gâcher une crise ». Cela signifie qu'il faut agir sur ses causes et y apporter des réponses de nature à prévenir de nouvelles crises. Dans les années 30, comme l'a rappelé Daniel Cohen (voir la rubrique « lu pour vous » sur le site Désirs d'Evenir), les gouvernements européens ont mis en place à contre-temps des politiques de rigueur qui ont plongé leurs pays dans la récession, avec son cortège de conséquences dramatiques sur le plan social et politique (deux ans plus tard, Hitler prenait le pouvoir en Allemagne...).
Aujourd'hui, les plans d'austérité qu'applique un grand nombre de pays européens sous la pression conjuguée des marchés financiers, de Bruxelles et du FMI, relèvent souvent d'une idéologie de l'orthodoxie budgétaire dont on peut craindre qu'elle soit non seulement très coûteuse socialement mais anti-économique.
Bien sûr, la réduction des déficits et la maîtrise des finances publiques sont choses nécessaires. Mais cela suppose qu'on ne se trompe pas de tempo et qu'on ne commence pas par écraser, au prétexte d'une doxa petitement comptable, les chances de reprise dans une Europe où la croissance est aujourd'hui la plus faible du monde.
Or tout se passe comme si, sous l'injonction arrogante des marchés financiers et des agences de notation, on était vite passé de l'autre côté du cheval : après les discours de 2008 sur le retour de l'Etat et les vertus redécouvertes du volontarisme économique, voilà que revient par la fenêtre la vieille rengaine de l'Etat minimal, des services publics budgétivores et d'une austérité particulièrement dure aux plus fragiles. Et cela alors même qu'une des causes des désordres mondiaux, ce sont les inégalités insupportables qui n'ont cessé de se creuser.
Ce devrait être à l'Europe de porter haut et fort un modèle alternatif qui fasse de la performance économique et de la justice sociale un couple indissociable, qui réhabilite le rôle de la puissance publique, qui accélère la croissance verte et la social-écologie, qui définisse les « biens publics » qui doivent être garantis à chacun à l'abri de la marchandisation à outrance, qui promeuve une démocratie plus participative comme condition de l'efficacité des politiques publiques.
Je crois profondément que le monde qui vient a besoin d'une Europe au clair sur ses valeurs, à l'écoute de ses peuples, capable de cohésion et de cohérence dans l'action, porteuse d'une parole forte en accord avec ses actes.
A Poros, où se déroulent nos travaux, c'est un point de vue partagé par beaucoup. Et notamment Joseph Stiglitz, qui intervient aujourd'hui pour tirer les leçons de la globalisation de la crise et tracer quelques pistes pour une action progressiste décidée non seulement à en sortir mais à éviter qu'on y retombe à la première occasion. Il est particulièrement scandalisé par la spéculation qui s'est attaquée aux maillons réputés les plus faibles de la zone euro et par ces lobbys financiers, renfloués sans contre-parties par les pouvoirs publics, qui mordent sans vergogne « la main de leurs sauveurs ». Partisan d'une régulation ferme de la mondialisation, d'une taxe sur les transactions financières (hélas rejetée par le G20 de Toronto) ainsi que d'une séparation des activités bancaires de dépôt et de marché (sujet apparemment tabou en Europe), Joseph Stiglitz craint, lui aussi, que l'obsession de la réduction immédiate des déficits publics ne fasse plonger l'économie. Il trouve l'Europe bien timorée dans ses réponses à la crise.
Cet après-midi, je suis impatiente d'entendre James Fishkin qui est l'inventeur, aux Etats-Unis, des « sondages délibératifs » dont la démarche, à l'opposé des sondages traditionnels, s'apparente à certains égards à celle des Jurys Citoyens que j'ai mis en place en Poitou-Charentes (panels représentatifs de la diversité sociale et surtout temps d'information et de débats permettant à des « profanes » de participer à une « délibération éclairée »). Je me réjouis que la question, à mes yeux essentielle, d'une démocratie plus participative, favorisant l'implication active des citoyens dans les décisions qui les concernent, ait pleinement droit de cité dans cette réunion de travail où il s'agit d'explorer ensemble de nouvelles réponses politiques aux problèmes du monde d'aujourd'hui.
La journée de demain sera principalement consacrée aux questions relatives à la lutte contre le changement climatique, au soutien aux énergies renouvelables et à la croissance verte comme gisements d'emplois d'avenir.
Gerd Leopold, océanographe et responsable de Greenpeace International, Joe Stanislaw, fervent partisan d'une approche globale des questions énergétiques (dans toutes leurs dimensions : locales et internationales, écologiques, économiques, de santé publique, etc.), Dimitri Zenghelis, membre du groupe qui a élaboré le « Rapport Stern » à la demande du gouvernement travailliste britannique et chiffré « le coût de l'inaction » écologique ainsi que Tina Birbili, Ministre grecque de l'Energie, de l'Environnement et du Changement climatique aborderont les enjeux du « droit à une énergie propre » et les choix qui inspirent les politiques volontaristes du gouvernement grec.
Vendredi 15, la séance plénière sera consacrée à un exercice plus prospectif autour de trois scénarios possibles pour l'Europe à l'horizon 2020, dans une perspective d'affirmation de son leadership. Les principaux intervenants seront Mary Kaldor, professeur à la London School of Economics, spécialiste de la mondialisation et partisane d'une politique étrangère mieux intégrée à l'échelle européenne, Cem Ozdemir, co-président des Verts allemands et premier Allemand d'origine turque à avoir été élu député, Alex Rondos, ancien ambassadeur des Etats-Unis en Grèce et ancien collaborateur de George Papandreou lorsqu'il était Ministre des Affaires étrangères, ainsi que Mark Medish, ancien collaborateur du Président Clinton et aujourd'hui conseiller à la Fondation Carnegie pour la paix internationale.
Voilà, chères amies, chers amis, un aperçu, non exhaustif, du programme de cette réunion de travail qui croise fort utilement les regards de chercheurs et d'acteurs qui ont en commune cette conviction : le monde change et l'action politique doit, elle aussi, changer.

Bien amicalement,

Ségolène Royal

11 juillet 2010

Bernard Thibault (CGT): «Sur les retraites, l'exécutif va devoir bouger»

Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT, met la pression sur le gouvernement. Sans demander la démission du ministre Woerth (qui ne «modifierait» rien), il exhorte l'exécutif à «bouger» sur les retraites «ou alors on aura une importante crise sociale à la rentrée». Il critique aussi le présidentialisme, la situation politique et les rivalités à droite: «Jean-François Copé (le patron des députés UMP) a sa propre stratégie politique, et le groupe parlementaire est de plus en plus au service de sa stratégie.» Dans la nuit du mercredi 7 au jeudi 8 juillet, la majorité a rejeté un amendement du gouvernement qui aurait permis d'instaurer une once de dialogue social dans les entreprises de moins de onze salariés.
Le ministre du travail, Eric Woerth, est-il affaibli?
Oui. (Long silence) Mais le personnage clé, c'est le président de la République. Nicolas Sarkozy peut bien remanier, mettre n'importe qui pour mener le dossier retraites: c'est lui qui ménera la réforme. Cette séquence fragilise (l'exécutif): avoir le ministre porte-parole de la réforme dans cet état-là... Mais un changement de ministre ne modifierait rien. D'autant que lorsque j'entends les hypothèses sur un remaniement... Xavier Bertrand (secrétaire général de l'UMP, ministre du travail de 2007 à 2009) serait tout sauf un gage d'ouverture: c'est quand même un de ceux qui ont enterré le thème de la pénibilité lorsqu'il était au ministère du travail! Le mot d'ordre en ce moment, c'est: «il faut à tout prix sauver le soldat Woerth». Le dossier retraites risque d'être pris en otage de cette situation. Car si le gouvernement esquisse le moindre mouvement, il sera interprété à partir d'une autre grille de lecture, celle de la polémique politique actuelle. Pourtant, l'exécutif va devoir bouger sur les retraites. Ou alors on aura une importante crise sociale à la rentrée.
Comment décririez-vous la situation sociale et politique?
J'ai été un des premiers à mettre en garde: dès lors que le président de la République revendiquait d'intervenir sur tout, dès lors qu'il prétendait être l'omniprésident, il était évident que ça allait provoquer une situation de blocage, tôt ou tard, et singulièrement sur les questions sociales. Je crois qu'on y est, ou en tout cas on n'en est pas loin. La situation actuelle peut déboucher sur une crise institutionnelle : quand le président gouverne au lieu de présider, en cas de mécontentement lourd, on arrive à un blocage. C'est très préoccupant.
Il n'y a plus de structures d'appel. Un président de la République, c'est quelqu'un qui sait apprécier ce qui est acceptable ou bien ce qui rejeté par le pays. Il sait prendre le recul nécessaire, éviter les blocages. Or, Nicolas Sarkozy a théorisé le fait qu'une fois élu, il avait les pleins pouvoirs. Quoi qu'il arrive, quels que soient les sujets (même ceux qu'il ne maîtrise pas forcément), les mécontentements et les protestations, il arbitre, et son choix s'impose. Au motif qu'il a été élu, il prétend avoir une légitimité de fait pour arbitrer, quoi qu'en pensent les autres acteurs, voire contre l'avis unanime des autres acteurs. C'est ce qui s'est passé avec les retraites: tous les syndicats disent qu'il s'agit d'une "réforme injuste", il n'y a pas photo.
Comment sortir de cette situation?
Ça... je n'ai pas la clé. Syndicalement, on n'a pas forcément la clé.
Est-ce que la crise politique actuelle ne peut pas vous profiter?
On n'en profite pas du tout. Dernier exemple, dans la nuit de mercredi à jeudi (7 et 8 juillet), avec le texte sur le dialogue social dans les TPE. Le patronat a fait un lobbying d'enfer pour obtenir du groupe majoritaire à l'Assemblée de s'opposer au texte du gouvernement... Là, on touche au jeu à droite qui est déjà à l'œuvre dans la perspective de la présidentielle: Jean-François Copé (le patron des députés UMP) a sa propre stratégie politique, et le groupe parlementaire est de plus en plus au service de sa stratégie. Dans cette configuration politique, il devient particulièrement compliqué d'assumer des responsabilités syndicales. En fonction des circonstances, l'interlocuteur déterminant change. Un coup, c'est le président de la République, un coup le président du groupe UMP – ce n'est jamais un ministre, pas même le premier ministre. Alors on peut faire le remaniement qu'on veut, je crains que ça ne change pas grand-chose...
Que reste-t-il du texte sur le dialogue social dans les très petites entreprises?
Il est vide de sens. On va organiser des élections tous les quatre ans pour les salariés des TPE uniquement pour qu'ils s'expriment sur des préférences syndicales sans que ça ait d'impact sur leur quotidien. C'est stupide! Ce vote ne servira à rien, sauf contribuer à définir la représentativité nationale des syndicats. Le groupe UMP a repris in extenso la théorie patronale (la CGMPE et le Medef, car d'autres organisations patronales étaient pour), qui exclut de faciliter la moindre présence dans les TPE. C'est une démarche très antisyndicale. Ce sont pourtant les mêmes députés qui ont voté la loi du 20 août 2008 sur la représentativité... Mais on n'est plus en 2008, la configuration politique est différente.
Une configuration politique assez folle, à vous écouter...
Oui, bien sûr. Et à ce point critique qu'elle génère un sentiment que les élus sont tous pourris. Dans une démocratie, on ne peut pas se satisfaire de la montée de ce genre de sentiment. C'est préoccupant, indépendamment des préférences partisanes qu'on peut avoir. Ce n'est pas sain.
Le climat est-il favorable pour une forte mobilisation début septembre? Car le calendrier n'est pas idéal, été oblige...
Il a été fait pour nous compliquer la tâche. C'est la troisième fois qu'on nous fait le coup d'une réforme en juillet, après les décrets Balladur de 1993, la loi Fillon de 2003... Cette fois, ils ont quand même senti le vent du boulet, et renoncé au plan initial qui était de faire adopter la loi en juillet. Mais l'examen du texte commencera quand même très tôt, le 6 septembre. On a été capables d'une grande action nationale un 24 juin, ça ne s'est jamais vu à cette échelle-là depuis de très nombreuses années. On a créé les conditions pour fixer un RDV à la rentrée, le 7 septembre. Le calendrier est serré. Les premières mobilisations d'ampleur lors d'une rentrée, c'est en général plutôt fin septembre début octobre, jamais plus tôt... Mais je pense que la mobilisation sera d'ampleur, à la grande surprise du gouvernement.

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    Le ministre du travail, Eric Woerth, est-il affaibli?
    Oui. (Long silence) Mais le personnage clé, c'est le président de la République. Nicolas Sarkozy peut bien remanier, mettre n'importe qui pour mener le dossier retraites: c'est lui qui ménera la réforme. Cette séquence fragilise (l'exécutif): avoir le ministre porte-parole de la réforme dans cet état-là... Mais un changement de ministre ne modifierait rien. D'autant que lorsque j'entends les hypothèses sur un remaniement... Xavier Bertrand (secrétaire général de l'UMP, ministre du travail de 2007 à 2009) serait tout sauf un gage d'ouverture: c'est quand même un de ceux qui ont enterré le thème de la pénibilité lorsqu'il était au ministère du travail! Le mot d'ordre en ce moment, c'est: «il faut à tout prix sauver le soldat Woerth». Le dossier retraites risque d'être pris en otage de cette situation. Car si le gouvernement esquisse le moindre mouvement, il sera interprété à partir d'une autre grille de lecture, celle de la polémique politique actuelle. Pourtant, l'exécutif va devoir bouger sur les retraites. Ou alors on aura une importante crise sociale à la rentrée.
    Comment décririez-vous la situation sociale et politique?
    J'ai été un des premiers à mettre en garde: dès lors que le président de la République revendiquait d'intervenir sur tout, dès lors qu'il prétendait être l'omniprésident, il était évident que ça allait provoquer une situation de blocage, tôt ou tard, et singulièrement sur les questions sociales. Je crois qu'on y est, ou en tout cas on n'en est pas loin. La situation actuelle peut déboucher sur une crise institutionnelle : quand le président gouverne au lieu de présider, en cas de mécontentement lourd, on arrive à un blocage. C'est très préoccupant.
    Il n'y a plus de structures d'appel. Un président de la République, c'est quelqu'un qui sait apprécier ce qui est acceptable ou bien ce qui rejeté par le pays. Il sait prendre le recul nécessaire, éviter les blocages. Or, Nicolas Sarkozy a théorisé le fait qu'une fois élu, il avait les pleins pouvoirs. Quoi qu'il arrive, quels que soient les sujets (même ceux qu'il ne maîtrise pas forcément), les mécontentements et les protestations, il arbitre, et son choix s'impose. Au motif qu'il a été élu, il prétend avoir une légitimité de fait pour arbitrer, quoi qu'en pensent les autres acteurs, voire contre l'avis unanime des autres acteurs. C'est ce qui s'est passé avec les retraites: tous les syndicats disent qu'il s'agit d'une "réforme injuste", il n'y a pas photo.

  • Comment sortir de cette situation?
    Ça... je n'ai pas la clé. Syndicalement, on n'a pas forcément la clé.
    Est-ce que la crise politique actuelle ne peut pas vous profiter?
    On n'en profite pas du tout. Dernier exemple, dans la nuit de mercredi à jeudi (7 et 8 juillet), avec le texte sur le dialogue social dans les TPE. Le patronat a fait un lobbying d'enfer pour obtenir du groupe majoritaire à l'Assemblée de s'opposer au texte du gouvernement... Là, on touche au jeu à droite qui est déjà à l'œuvre dans la perspective de la présidentielle: Jean-François Copé (le patron des députés UMP) a sa propre stratégie politique, et le groupe parlementaire est de plus en plus au service de sa stratégie. Dans cette configuration politique, il devient particulièrement compliqué d'assumer des responsabilités syndicales. En fonction des circonstances, l'interlocuteur déterminant change. Un coup, c'est le président de la République, un coup le président du groupe UMP – ce n'est jamais un ministre, pas même le premier ministre. Alors on peut faire le remaniement qu'on veut, je crains que ça ne change pas grand-chose...
    Que reste-t-il du texte sur le dialogue social dans les très petites entreprises?
    Il est vide de sens. On va organiser des élections tous les quatre ans pour les salariés des TPE uniquement pour qu'ils s'expriment sur des préférences syndicales sans que ça ait d'impact sur leur quotidien. C'est stupide! Ce vote ne servira à rien, sauf contribuer à définir la représentativité nationale des syndicats. Le groupe UMP a repris in extenso la théorie patronale (la CGMPE et le Medef, car d'autres organisations patronales étaient pour), qui exclut de faciliter la moindre présence dans les TPE. C'est une démarche très antisyndicale. Ce sont pourtant les mêmes députés qui ont voté la loi du 20 août 2008 sur la représentativité... Mais on n'est plus en 2008, la configuration politique est différente.
    Une configuration politique assez folle, à vous écouter...
    Oui, bien sûr. Et à ce point critique qu'elle génère un sentiment que les élus sont tous pourris. Dans une démocratie, on ne peut pas se satisfaire de la montée de ce genre de sentiment. C'est préoccupant, indépendamment des préférences partisanes qu'on peut avoir. Ce n'est pas sain.
    Le climat est-il favorable pour une forte mobilisation début septembre? Car le calendrier n'est pas idéal, été oblige...
    Il a été fait pour nous compliquer la tâche. C'est la troisième fois qu'on nous fait le coup d'une réforme en juillet, après les décrets Balladur de 1993, la loi Fillon de 2003... Cette fois, ils ont quand même senti le vent du boulet, et renoncé au plan initial qui était de faire adopter la loi en juillet. Mais l'examen du texte commencera quand même très tôt, le 6 septembre. On a été capables d'une grande action nationale un 24 juin, ça ne s'est jamais vu à cette échelle-là depuis de très nombreuses années. On a créé les conditions pour fixer un RDV à la rentrée, le 7 septembre. Le calendrier est serré. Les premières mobilisations d'ampleur lors d'une rentrée, c'est en général plutôt fin septembre début octobre, jamais plus tôt... Mais je pense que la mobilisation sera d'ampleur, à la grande surprise du gouvernement.

  • Du même ordre que le 24 juin?
    On verra. Le 7 septembre sera une reprise. Il est important que le point de départ de cette «remobilisation» soit d'un haut niveau, ce qui peut nous permettre d'autres initiatives derrière...
    D'autres mobilisations pourraient suivre pendant l'examen du texte au Parlement?
    Dans cette situation politique et sociale, il faut se garder de schémas préétablis. 
    La discussion avec le gouvernement continue sur les retraites...
    On a une réunion ce soir (l'entretien a été réalisé jeudi) au ministère du travail sur le dossier des retraites, je ne sais pas ce qui va en sortir. Je ne sais même pas d'ailleurs ce qu'a pu être le temps consacré aux retraites ces huit derniers jours au ministère du travail. Je ne suis pas sûr que cela ait tout à fait mobilisé le ministre, son directeur de cabinet et ses services...
    Demandez-vous au président de la République de faire évoluer sa position?
    Je suis incapable de vous dire où ils en sont à l'Elysée. Je ne sais pas si eux-mêmes le savent. Mais ce qu'on sait, c'est qu'ils vont devoir bouger. Sitôt la réforme présentée, le président de la République a demandé au ministre du travail de rouvrir les discussions avec les syndicats sur la pénibilité, les carrières longues et les polypensionnés: ils savent donc déjà qu'ils ne tiendront pas sur ces trois questions.
    Sur la pénibilité, l'Elysée a choisi de retenir le schéma proposé par le Medef. Ils savaient que nous serions vent debout. Ils sont déjà en train de travailler sur autre chose. Sur quoi, comment, je suis incapable de vous dire, mais ils vont devoir bouger. Le spot télé gouvernemental qui passe en ce moment montre un homme qui dit «J'ai mal au dos, je vais pouvoir partir à 60 ans». Il faudra tout de même qu'il soit invalide à 20%! Si tous ceux qui avaient mal au dos partaient à la retraite, il n'y aurait pas beaucoup de plus de 55 ans au travail...
    Sur les carrières longues, le gouvernement profère un mensonge. Après la manifestation, Fillon a dit que tous ceux qui ont commencé à travailler avant 18 ans pourront partir à 60 ans. C'est faux. Le projet dit qu'ils pourront partir “dès” 60 ans. Pour eux comme les autres, il faudra avoir la durée de cotisation exigée plus deux ans, ça veut dire 43,5 ans à terme. Ils vont aussi devoir bouger là-dessus.
    Ils ont une obstination: faire passer l'âge légal de 60 à 62, et l'âge à taux plein de 65 à 67. C'est le cœur de leur démarche. Ça me fait penser à des réformes précédentes. Les régimes spéciaux, par exemple. L'essentiel, c'était de pouvoir dire «On a fait une réforme des régimes spéciaux.» C'est vrai, mais le prix à payer n'est pas tout à fait celui escompté. Ou encore: «On a fait une réforme du service minimum.» Mais le texte adopté n'empêche pas qu'il n'y ait plus du tout de bus, de trains de métros s'il y a beaucoup de grévistes. Il va y avoir ce jeu-là, à nouveau. On va communiquer et nous dire: «On a fait une réforme des retraites.» Maintenant laquelle, ça reste complètement ouvert. Le projet va être en partie modifié, ce ne sera pas le même sur des aspects non négligeables, comme la pénibilité.
    On vous l'a assuré?
    Non. Mais ils retravaillent sur la réforme, c'est clair. Et nous allons nous faire fort de montrer que si on peut les faire bouger sur certains aspects du texte, il n'y a pas de raisons qu'on n'essaie pas de les faire bouger sur l'ensemble.

8 juillet 2010

Monarchie républicaine: les Français se révoltent

La rage contre les élites atteint un niveau sans précédent. La mèche du populisme est allumée contre une société bloquée de connivences et de statuts.
La liste est longue des ministres dont la vindicte populaire a successivement demandé la tête (Albanel, Kouchner, Besson, Hortefeux, Mitterrand.....). Deux secrétaires d'Etat, récemment épinglés pour leur utilisation de l'argent public, Alain Joyandet et Christian Blanc, ont démissionné dimanche 4 juillet. Le chef de l'Etat,  à peine élu, a fait l'objet d'un foisonnement éditorial sans précédent -près de 70 livres, dont le plus célèbre, «De quoi Sarkozy est-il le nom?» d'Alain Badiou s'est vendu à plusieurs dizaines de milliers d'exemplaires.  Ce philosophe n'hésite pas à parler, sans plus de nuances,  d'«une barbarie sarkozienne»- et brandit un marxisme dont on imaginait qu'il avait sombré dans les ténèbres de l'histoire.
Nicolas Sarkozy, fort de son succès aux élections présidentielles, a cru pouvoir imposer le spectacle d'un argent décomplexé. Mais il aurait pu aussi saisir en cinq minutes -instruit par la bourrasque qui s'est levée d'une soirée au Fouquet's et d'une croisière de luxe-, que cet étalage était reçu comme une insulte. Le bouclier fiscal à 50% pour les gros contribuables demeurera comme une faute originelle, davantage comme l'emblème d'une orientation politique, «le cadeau fait aux riches»,  que par le manque à gagner réel pour les finances publiques. Presque depuis son début, l'action de Nicolas Sarkozy a fourni un carburant au sentiment anti élite des Français, et cette rage s'est rehaussée d'un cran avec la crise financière et les révisions qu'elle impose à notre modèle social.
L'affaire Woerth -pour lequel, rappelons-le, aucun délit ne semble vraiment démontré- marque un point d'orgue. Elle porte sous le feu des médias un microcosme de connivences et de «petits arrangements»: un univers qui est loin d'être un mystère puisque les magazines people en font leur miel, et que la culture contemporaine a définitivement balayé la digue qui sépare les «activités publiques» des vies privées. Cette société de cour (Norbert Elias) mêle des héritiers des grandes fortunes, les dirigeants économiques, l'élite politique et le showbiz: un réseau souple de personnes qui se rencontrent fréquemment sous les lambris des palais de la République (et ailleurs), avec les favoris, les habitués, des intermittents, les tenus à distance, des transfuges, les amis indéfectibles, etc... Et cette solidarité de réseaux, à quelques nuances près, saute allègrement les changements de majorité politique (voir mon enquête sur L'élite rose de 1982).
De ce mode de fonctionnement les Français se sont accommodés pendant des décennies, grâce au prozac  de la croissance. Quand il faut faire des sacrifices, les électeurs deviennent plus regardants. Néanmoins cette indulgence envers les élites est une marque de fabrique du pays. Quelle nostalgie d'un passé majestueux, quel calcul personnel (chacun peut espérer voir son enfant intégrer un grand corps par la voie hyper étroite de la méritocratie scolaire), ou quelle insolite fascination  à l'égard «des puissants» expliquent cette mansuétude? La liste est longue des réformes qu'il eut fallu entreprendre pour briser  la consanguinité des cercles du pouvoir: de la réforme scolaire (voir le livre de Baudelot/ Establet sur l'élitisme républicain) aux règles du pantouflage dans la haute fonction publique, du cumul des mandats à une législation rigoureuse sur la notion de conflits d'intérêt. Ces sujets finissent par être des serpents de mer auxquels aucune fraction de l'élite politique ne s'est vraiment attaquée, faute de trouver en son sein une majorité de convaincus ou de déterminés.
Le quatrième pouvoir, celui que prétendent incarner les grands médias, enfin, se caractérise par ses «distanciations imparfaites» avec le microcosme des sommets (Cyril Lemieux, Mauvaise Presse) et n'a jamais mené de combat ciblé sur  la monarchie à la française. Il est plus facile de fustiger des logiques financières abstraites que de démonter finement les intrications de personnes morales ou physiques dans les sphères de dirigeants. Quand Le Monde, récemment, a révélé par une enquête la consanguinité des membres des conseils d'administration des entreprises du CAC 40, l'information n'a suscité qu'un émoi passager. Seule nouveauté législative: l'ouverture de ces instances dirigeantes aux femmes. Les heureuses recrues sont pratiquement toutes issues du même milieu et/ou des mêmes écoles, ce qui démontre presque par l'absurde la fermeture des cercles du pouvoir (Florence Woerth est entrée en 2010 au Conseil de surveillance de Hermès).
Une société à statuts
Comment est on alors passé d'une opinion publique qui «ferme les yeux» à une opinion publique en rébellion? D'abord, en France le sentiment anti élite, et notamment anti pouvoir de l'argent, est à fleur de peau et peu ne faut pour le réveiller. Comment le démontre un livre  déjà ancien de Pierre Birnbaum, Le peuple et les gros (1979), dans ce pays de tradition catholique, la méfiance vis-à-vis des riches est fortement enracinée. Les 200 familles détentrices de grosses fortunes ont  fait l'objet de la haine populaire dans l'avant-guerre, et cette stigmatisation s'est souvent articulée à l'extrême droite, en association avec un antisémitisme latent. Aujourd'hui, c'est moins la richesse installée (les grandes familles industrielles ont conquis une respectabilité) qui révolte que celle, démesurée, fraichement acquise par le levier de la finance et des médias et plus généralement de l'économie mondialisée.  Cette nouvelle donne creuse les inégalités aux deux bouts de l'échelle sociale avec les pauvres (13% de la population vit avec un revenu en dessous du seuil de pauvreté) et les super riches (moins de 0,1% de la population aux revenus extravagants). Parallèlement, elle fragilise l'assise des classes moyennes, dont une partie se paupérise. La violence anti élite vise donc ces nouveaux seigneurs du capitalisme, incarnés par la caricature du bling-bling .
Dans leur livre sur La société de défiance (2006), les économistes Yann Algain et Pierre Cahuc dépeignent les traits d'une France peu solidaire, où chacun se méfie de l'autre -cet autre toujours soupçonné de consolider ses droits et avantages en jouant de son statut  et des réseaux afférents. Ce modèle d'une société à statuts s'est construit à travers des prébendes étatistes et corporatives.   L' esprit de méfiance renforce alors la suspicion à l'égard de la réussite économique: une majorité de français pensent qu'on ne peut arriver au sommet sans être corrompu. Ainsi l'exaspération des petits contre les gros, des défavorisés (exposés aux aléas du marché) contre les privilégiés (à statut),  toutes ces humeurs qui travaillent depuis longtemps la société française se voient stimulées, poussées à leur paroxysme dans le contexte de la crise financière et de ses effets sociaux en cascade: d'un côté les gagnants (suspects) du grand casino mondial, de l'autre, les perdants.
Sentant le socle du navire France vaciller sous leurs pieds, les français portent un regard préoccupé sur l'avenir de leur progéniture. Une fraction importante de celle-ci peine à s'intégrer dans une société où plus que jamais diplômes et relations opèrent comme des sésames, rendant particulièrement aride et incertaine l'insertion professionnelle de ceux qui en sont dépourvus. Beaucoup de parents d'adolescents sont ainsi devenus obsédés par les résultats et  l'orientation scolaire, alors que simultanément pointent dans les collèges et les lycées des questions socialement explosives: la phobie des études et l'absentéisme. L'angoisse autour des générations montantes recompose alors la thématique des gagnants et des perdants autour du destin des descendants.
Parallèlement, la parole des «gens d'en bas» et plus encore celle des couches moyennes, s'est libérée. Sur ce point, la vertu égalitaire d'Internet est souvent désignée. Le Réseau ouvre des promesses sans limites à la liberté d'expression et, finalement, transforme la tonalité et le contenu de l'espace délibératif. Non seulement il offre une tribune à tout individu qui cherche à faire connaître son point de vue, mais surtout il a permis une floraison de journaux et sites d'informations indépendants qui, en raison des coûts de fabrication et de transmission, n'auraient jamais vu le jour dans les entreprises de l'édition traditionnelle (voir l'article de Jean-Marie Charon dans la revue Réseaux janvier-mars 2010).
Dans le cyberspace,  les modes d'expression s'éloignent considérablement de celles en cours dans les instances de la démocratie représentative, fondées sur le raisonnement et le rattachement à la géographie sémantique des partis politiques. Il autorise toutes les passions, et même toutes les pulsions. Ici, l'individu incline à se délester du «surmoi» et des codes en cours dans le monde physique. En particulier dans les blogs et les forums politiques, l'humeur, l'exaltation, l'invective, l'affirmation péremptoire bourgeonnent plus fréquemment que l'opinion balancée: or ces blogs qui reflètent «l'esprit du Net» sont souvent tenus et suivis par des couches intellectualisées, catégories dont l'image et le statut, précisément, sont ébranlés par le tourbillon de la mondialisation. Des rumeurs ainsi que des informations fausses ou approximatives se propagent et enflent sans rencontrer le filtre de l'expertise qui, dans les médias anciens, garantissait une certaine validation. En retour, le Web contribue  à rectifier, déminer, moquer ce qui dans les news est répété à vide comme des évidences. La matrice intellectuelle du blogueur, c'est la non crédulité, et sa boussole, sa subjectivité.
Certes, le Web a été un détonateur  pour l'expression des individus mais il véhicule, retravaille et amplifie des tendances qui s'enracinent dans l'histoire des médias audiovisuels depuis une vingtaine d'années: le fun et la dérision à l'égard de la scène politique traditionnelle, la confiance accordée à la parole des témoins ordinaires, l'empathie à l'égard des «petits», en particulier s'ils se manifestent en victimes. Ce regard «pas dupe» et «qui ne s'en laisse pas compter«  est  en congruence depuis longtemps avec la sensibilité  des jeunes, qui plus que les autres se sont appropriés les émissions «décalées» sur la politique (les Guignols de l'info, le grand journal de Canal +) et la téléréalité. Ce scepticisme hilare a contaminé l'ensemble de la population, il configure «la culture  d'aujourd'hui». Et s'il n'est pas si nouveau, il est décuplé par la puissance du Net.
De fait, la sphère publique remodelée flatte ce puits sans fond de l'anti élitisme, et fait feu de tout bois. Dans ce mouvement complexe, qui charrie autant de scories que de pépites, l'idéal de solidarité et de fraternité -la gratuité dans son sens altruiste est une valeur cardinale du Net- semble prendre le pas sur la vénération monarchique.
Peut-être l'envie de déboulonner la société de cour qui subsiste en France comme une hérésie historique l'emportera-t-elle. Il n'existe aucune fatalité pour que demeurent pour l'éternité une telle fermeture et un tel contentement de l'entre-soi entre bien nés et bien éduqués. Probablement aussi une société bardée de tant de filets sociaux ne bouge que par à-coups maitrisés. Difficile alors de dire où mènera la collusion entre l'anti élitisme enraciné de la société française, la défiance généralisée à l'égard des «nouveaux riches» et le pilonnage basiste d'internet. On le sait, au moment des élections, cette humeur peut s'éparpiller dans plusieurs directions: l'abstention, la gauche ou l'extrême gauche. Ou l'extrême-droite. Le populisme est une mèche enflammée que seuls des artificiers à sang froid peuvent éteindre. L'opposition en a-t-elle conscience?
Monique Dagnaud

1 juillet 2010

Communiqué Gaëlle Lenfant Secrétaire nationale adjointe Droits des femmes

Vote de la loi contre les violences faites aux femmes : une avancée importante qui doit maintenant être mise en œuvre
L’Assemblée nationale a adopté aujourd’hui à l’unanimité une proposition loi contre les violences faites aux femmes, largement issue des travaux de la mission d’information sur les violences faites aux femmes, présidée par la députée socialiste Danièle Bousquet. Le Parti socialiste salue le rôle joué par l’ensemble des parlementaires de gauche et par les nombreuses associations avec lesquelles ils ont travaillé. Ils ont rendu possible cette avancée importante pour les droits des femmes, l’égalité dans notre société et la lutte contre les préjugés et violences sexistes. Des mesures comme « l’ordonnance de protection », la création du délit de «violence psychologique» et le bracelet électronique pour les conjoints violents peuvent permettre de changer vraiment les choses pour des milliers de femmes.
Mais pour être mises en œuvre, ces mesures ont besoin de volonté politique et de moyens. Or, la volonté politique du gouvernement à l’égard des droits des femmes est aux abonnés absents. En 2010 la lutte contre les violences faites aux femmes a été proclamée grande cause nationale mais aucune action ambitieuse d’envergure nationale n’a été menée par le gouvernement ! Cette année aura surtout vu la disparition de plusieurs associations féministes essentielles, dont le travail décisif a été ruiné par le retrait de financements de l’Etat.
Les socialistes seront donc très vigilants et ils veilleront à l’application effective de cette loi. Des moyens humains et financiers conséquents doivent êtres mobilisés afin de donner toute leur force aux outils juridiques.
Paris, le 29 juin 2010
 10, rue de Solférino - 75333 Paris cedex 07 - Tél. : 01 45 56 77 26 ou 79 55
parti-socialiste.fr – courriel : presse@parti-socialiste.fr

Retraites : la « panique » des fonctionnaires avec trois enfants

En 2012, ils ne pourront plus partir en retraite après quinze ans de service et, dès ce 13 juillet, leur pension diminuera.

C'est un lièvre créant la « panique » qu'a levé la semaine dernière la CFDT. Dans les premiers médias à relayer l'information, Libération titre le 21 juin : « Fonctionnaires avec trois enfants : partez vite ! » Déjà sujette à moult critiques, la réforme des retraites renferme une mesure particulièrement pernicieuse.

Non seulement les fonctionnaires ayant trois enfants et quinze ans de service ne pourront plus partir à la retraite lorsqu'ils le souhaitent à partir du 1er janvier 2012, mais en plus les conditions financières seront nettement moins favorables dès le 13 juillet prochain.

  .......A un jour près, une retraite peut être amputée de 20%, 30% ou 40% de sa valeur !...

Par Julien Martin | Rue89 | 29/06/2010 | 16H42

eco.rue89.com/2010/06/29/retraites-la-panique-des-fonctionnaires-avec-trois-enfants-156868

L’échec de Martine ouvre la voie Royal

Arrivée à la tête du PS dans une élection entachée de soupçons de fraudes, Martine Aubry a d’abord rencontré des difficultés pour s’imposer. Mais maîtresse des arbitrages dans la répartition des postes, elle a pu unir la vieille garde du PS et les nouveaux venus, notamment à la gauche du PS, et faire taire certaines discordances. Nous « travaillons collectifs » devenant le mot d’ordre imposé à tous les cadres petits ou grands du PS. Il suffit de les interroger, inévitablement l’expression surgit de toutes les bouches « le PS s’est remis au travail ».
La victoire aux régionales semblait apporter la preuve d’un renouveau, d’une renaissance du PS après un trop long temps d’obscurantisme.
 
Sauf que, sur le terrain, la situation n’est pas du tout celle qu’on voudrait faire entendre dans les médias …
Avec un nombre de militants en forte chute et des élections calamiteuses lors des dernières conventions, le PS se vide et ne semble pas réellement en capacité d’offrir une image d’alternance crédible malgré un président très affaibli par l’échec de sa politique et les affaires à répétition. La dernière convention, sur les Primaires et la rénovation, devait éveiller l’intérêt et l’adhésion des militants, elle n’a pas plus fait recette que la précédente. Avec notamment  16 % seulement de participation à Paris, le Parti socialiste compte ses élus mais il ne dispose plus d’une force militante pour porter sa voix dans la vie réelle, dans les familles et au travail.
On avait trop vite oublié que les régionales ont été gagnées par l’abstention, notamment dans les quartiers populaires. L’incapacité à créer une dynamique au PS sonne l’échec de Martine Aubry. On peut en effet redouter qu’en cas d’une candidature en 2012 elle ne devienne Madame 5% score qu’avait obtenu Gaston Defferre en 1969, avant que la SFIO mute en PS.
 
Alors mort le PS ? Pas sûr car le PS dispose toujours d’une carte maîtresse. Certes femme trop libre pour être adoptée par une partie des cadres du PS, Ségolène Royal aura besoin d’un Nouveau Parti Socialiste pour porter la gauche à la victoire. C’était l’enjeu du Congrès de Reims. Après l’échec de Martine Aubry une voie Royal s’ouvre.
A moins que les partisans de l’échec ne l’emportent. 2012 deviendrait un nouveau1969 imposant une mutation totale du Parti.
Dans l’autre hypothèse, Ségolène Royal a la capacité de redonner à ce Parti sa force par la dynamique qu’elle sait porter et son ancrage dans les couches populaires. Pour un Etat impartial, une politique volontariste, un virage réellement écologiste, un Etat plus juste et une démocratie plus active, Ségolène Royal peut incarner la force tranquille pour le changement dont nous avons besoin face à Nicolas Sarkozy. Reste son seul souci: l’appareil du Parti socialiste. Pour ne pas revivre 2007, malgré la dynamique créée, il faudra rassembler, au PS et au-delà du PS. C’est tout le travail qui s’impose aujourd’hui à Ségolène Royal. Une partie difficile à mener mais décisive pour porter la gauche à la victoire et mettre fin au sarkozysme.
 
Philippe Allard