18 mai 2010

Les causes inavouables du déséquilibre budgétaire des régimes des retraites

L’objectif qu’annonce le gouvernement dans un document d’orientation sur la réforme des retraites est d’apporter une “réponse aux déséquilibres des régimes de retraite”, il me semble qu’il faut aller au-delà de la réponse uniquement démographique que le gouvernement entend lui apporter. Car le problème démographique devrait disparaître dès 2020….

Il y a bien d’autres causes à ce déficit des caisses de retraites, endémique depuis 2000.

Le chômage et le blocage des salaires:

Certes le gouvernement n’a visiblement pas l’intention de faire quoi que ce soit pour que le chômage disparaisse…et pour cause, moins de gens qui travaillent en produisant plus avec un salaire bloqué, ça fait monter la compétitivité du pays…Mais ça vide les caisses de retraite!

Pourtant , c’est bien cette omission de l’impact du chômage et du blocage des salaires dans les causes du déficit des caisses de retraite qui laisse entendre que le gouvernement n’a en aucun cas l’intention de régler le problème du chômage et d’augmenter les salaires. L’intérêt de tous serait pourtant , plutôt que de s’évertuer à faire travailler plus longtemps les personnes de plus de 55 ans, de mettre en œuvre une politique de plein-emploi des 20-30 ans et des chômeurs de moins de 55 ans. Financièrement les jeunes entrant dans la vie active sont moins payés que les plus anciens mais comme ils cotiseraient, les caisses de retraites continueraient à se remplir…et comme les plus anciens ne seraient plus abimés par le travail, je suis certaines que les caisses d’assurance maladie seraient soulagées….

Le désengagement du gouvernement envers le Fonds de Réserve des Retraites:

En accusant la crise économique d’avoir “accéléré l’augmentation de ces déficits”, le gouvernement oublie de dire qu’en 1999 la loi de financement de la sécurité sociale avait créé un fonds de réserve pour les retraites. Ce fonds était censé constituer une cagnotte de 150 milliards d’ici 2020, afin d’amortir les effets du déséquilibre démographique prévu entre 2010 et 2020. Ce fonds de réserve devait être abondé par le produit que l’État retirait des privatisations, par la vente de la quatrième licence UMTS et par le produit d’une taxe sur les transactions boursières.

Or, quel constat pouvons-nous faire en 2010?

Depuis 2002, l’État français n’a pas tenu ses engagements. La vente du Crédit Lyonnais, les recettes de privatisation n’ont pas été versées au Fonds de Réserve pour les Retraites. En 2007, le fonds a investi 195 millions d’euros, sur un fond à part, chez Lehman Brothers. Malgré la faillite, le 15 septembre 2008, de cet organisme, les fonds placés sont, en principe, récupérables.

Comment se fait-il que cette somme de 195 millions ne soit pas récupérée et compensée par l’État au fonds de réserve pour les retraites?

Comment se fait-il que, pas plus que lors des réformes de 2003 et de 2008, le gouvernement ne prenne en compte ces 195 millions d’euros pour combler le déficit des caisses de retraites?

La quatrième licence UMTS a été vendue, en 2009, à Free pour une somme de 240 millions d’euros. Où sont passés ces 240 millions d’euros?

l’État, vient ici nous faire des leçons de solidarité, de démographie,et se permet de laisser s’évanouir 435 millions d’euros en un ans. 435 millions d’euros qui auraient dû alimenter le fonds de réserve pour financer une partie du régime de retraite lorsque les déficits se creusent sous l’effet du vieillissement, ce qui est le cas actuellement et jusqu’en 2020.

La mauvaise gestion et la trop grande multiplicité des caisses de retraites:

435 millions d’euros en un an, je sais bien, c’est une goutte d’eau par rapport au déficit abyssal que 10 années de mauvaise gestion des différentes caisses de retraite ont creusé.

Mais c’est un début en attendant qu’enfin on se décide à mettre à plat la multitude de caisses de retraite corporatiste qui n’oublient pas de quémander des compensations à l’État, alors qu’elles ne sont pas déficitaires.

Parce qu’à bien y regarder rien que pour le régime général de retraite j’ai dénombré 39 caisses de retraites! Et toutes défendent leurs petits privilèges, leurs régimes particuliers, se font verser des compensations par l’Etat. A quel titre, ont peu se le demander pour certaines…..

Et personnellement toutes ces caisses me font penser au trous d’une passoire quand je regarde le déficit global des caisses de retraites. J’ai comme l’impression qu’il y a pas mal d’argent qui fuit au travers de ces trous…

Sources: e24 ; L’expansion ; Journal du Net ;

Ségolène Royal : «Ce serait une grave erreur de réduire la réforme à la hausse de l’âge de départ à la retraite»

Ségolène Royal réagit sur la réforme des retraites :

Ségolène Royal : «Ce serait une grave erreur de réduire la réforme à la hausse de l’âge de départ à la retraite»

Sans attendre le bureau national du Parti socialiste, qui doit avoir lieu dans la soirée du 18mai, la présidente socialiste de la région Poitou- Charentes prend position sur le document d’orientation du gouvernement sur la réforme des retraites. Si elle reconnaît certaines avancées, commela création d’une contribution nouvelle prélevée sur les hauts revenus et les revenus du capital, elle doute de la validité des projets gouvernementaux qui devraient s’accompagner, à ses yeux, d’une révolution fiscale et d’une nouvelle politique industrielle.

Le gouvernement vient de transmettre aux partenaires sociaux son «document d’orientation sur la réforme des retraites ». Quelle est votre réaction?

On assiste à un recul inattendu du gouvernement, puisqu’il se dit prêt, pour la première fois, à examiner le volet recettes d’une réformedes retraites. Il parle d’«une contribution supplémentaire sur les hauts revenus et les revenus du capital». C’était une de nos exigences anciennes et c’est un acquis du rapport de force que nous avons su créer avec lui. Mais il doit annoncer très rapidement quel sera le niveau de ces prélèvements. Avant toute décision sur la dépense, les Français doivent savoir combien on encaisse. Si ces prélèvements sont faibles, cela sera seulement un nouveau tour de passe-passe pour endormir les forces sociales.

Quand le document parle de «réforme systémique», cela correspond- il aussi à vos attentes?

On peut considérer cela commeun point positif car c’est ce dont la France a besoin. Mais le gouvernement ne met pas tous les éléments sur la table. Qu’en estil de la révolution fiscale qui devrait être le corollaire de la réforme des retraites, le bouclier, les niches? Il doit aussi préciser ses intentions sur la pénibilité de certains emplois, c’est un débat bloqué depuis de longs mois et c’est inadmissible. Il y a des travaux qui aliènent. C’est vrai pour les emplois précaires qui se succèdent en contrats à durée déterminée (CDD), c’est vrai pour certains emplois de France Télécom. Les conditions de travail ne sont pas pour rien dans ce que le médiateur de la République appelait récemment la «fatigue psychique » de la société française. La retraite intervient dans la vie des Français commeun moment où chacun peut suivre le rythme de sa vie personnelle. Ce serait une grave erreur de réduire la réforme à la hausse de l’âge de départ à la retraite et à la durée de cotisation.

Pourtant, si on en croit les termes de la «consultation populaire sur la retraite et la fiscalité» que vous avez lancée sur votre site Internet desirsd’avenir.org, l’augmentation de la durée de cotisation n’est pas un sujet tabou.

Si le maintien de l’âge légal de départ à 60 ans n’est pas négociable, la modification de la durée de cotisation, elle, ne pourrait intervenir qu’en dernière instance. Tous les paramètres internes et externes doivent d’abord être considérés et, si nécessaire, à la fin, et seulement à la fin, la question de la durée de cotisation pourra être posée. Pour que nous l’acceptions, il faudrait que des garanties aient été apportées sur le montant des pensions et que le gouvernement accepte d’établir un calendrier précis pour ré-abonder le Fonds de réserve que nous avions créé en 1999, en imaginant des recettes nouvelles.

Préconisez-vous aussi, comme l’aile gauche du PS, une nouvelle taxation sur les bénéfices des banques?

J’y suis tout à fait favorable. Plus largement, la question de la réglementation de l’activité bancaire n’a pas été réglée. Sur le terrain, on vit le contraire de ce que dit le président de la République. C’est tout demêmeincroyable que les régions soient obligées de garantir les prêts bancaires et que l’Etat ne fasse rien.

Quel bilan faites-vous des trois premières années de la présidence de Nicolas Sarkozy?

Il aurait fallu qu’il sache pourquoi il était là. Trois ans passés, et pas le début du commencement d’une politique industrielle. Le tournant de l’investissement massif dans la croissance verte n’a pas été pris ; rien n’a été fait pour recadrer l’activité économique et remettre en ordre les aides aux entreprises. Nicolas Sarkozy n’a jamais réuni, par exemple, les responsables de la filière automobile pour essayer de mettre fin à la vaine concurrence qu’ils se mènent alors qu’ils devraient concevoir ensemble la voiture électrique de demain. Angela Merkel l’a fait en Allemagne et ils sont en train de nous passer devant…On assiste aussi à une incroyable démobilisation des territoires. Nicolas Sarkozy n’a jamais réuni les présidents de région pour esquisser un travailcommun entre l’Etat et les collectivités. La droite est partout défailllante, elle manque de volonté et d’imagination.

Propos recueillis par Olivier Schmitt

http://www.desirsdavenir.org/s-gol-ne-royal/le-blog/s-gol-ne-royal-ce-serait-une-grave-erreur-de-r-duire-la-r-forme-la-hausse-de-
Evénement :

Ségolène Royal vous invite à participer à la consultation populaire sur les retraites et la fiscalité ouverte par Désirs d'avenir

Je lance une consultation populaire sur les retraites et la fiscalité ouverte par Désirs d'avenir.

Les Français doivent prendre la parole sur ce qui les concerne. Il n’est pas acceptable que cette parole soit confisquée par le gouvernement. Désirs d’avenir veut être la voix des sans-voix. Venez participer, prenez la parole ! Et plus nous serons nombreux, plus cette parole sera entendue.

Comment prendre la parole ? Venez sur le site Désirs d’avenir sur le forum spécialement ouvert à ce sujet et organisez partout des réunions. Des correspondants locaux feront remonter les propositions dont nous rendrons compte. A Désirs d’avenir, une équipe a rédigé un premier document de travail que vous trouverez ci-dessous pour comprendre et pour participer, animer des débats sur le territoire et surtout prendre la parole sur le forum internet.

Ségolène Royal Présidente de Désirs d’avenir

Pour lire le document de travail de Désirs d'Avenir pour la consultation populaire sur les retraites et la fiscalité cliquez sur le lien suivant :

http://www.desirsdavenir.org/s-gol-ne-royal/les-actualit-s/ev-nement/17-05-2010

10 mai 2010

10 mai 2010 L'esclavage et son abolition : une histoire partagée, des valeurs universelles

Untitled documentChères amies, chers amis,

La lourdeur de l'actualité, la crise financière européenne, la marée noire sur les côtes américaines, la politique de rigueur annoncée par le gouvernement, le grave recul du Grenelle de l'environnement, les menaces sur les retraites et bien d'autres sujets graves d'inquiétudes et de colère – dont je vous parlerai demain – vont sans doute rejeter au second plan ce qu'il faudrait activement commémorer en ce 10 mai 2010 : non pas seulement l'élection de François Mitterrand en 1981, ce jour d'espoir si cher à notre coeur, mais la « journée nationale des mémoires de la traite négrière, de l'esclavage et de leurs abolitions ». Je voudrais toutefois vous en parler un peu car c'est un jour important et une page de notre histoire.
Cette date a été choisie car c'est le 10 mai 2001 que fut définitivement adoptée par le Parlement la loi proposée par Christiane Taubira, députée de la Guyane, et soutenue par la gauche, reconnaissant la traite et l'esclavage pour ce qu'ils furent : un crime contre l'humanité.
La République, ce jour-là, assuma avec lucidité un passé constitutif de notre histoire commune et décida de rendre hommage à ceux, noirs et blancs, esclaves et abolitionnistes, qui se dressèrent contre « l'infâme commerce ».
La France, ce jour-là, fut digne de ses valeurs.
Loin, très loin de ceux qui, sous prétexte de pourfendre je ne sais quelle repentance imaginaire, la voudrait amnésique, oublieuse de ses combats fondateurs, frileusement crispée sur une identité au rabais.
A l'opposé de ceux qui tentèrent, en 2005, de donner force de loi aux « bienfaits de la colonisation » et de ces 40 députés UMP qui, à la veille du 10 mai 2006, voulaient empêcher que, conformément à l'article 2 de la loi de 2001, les programmes scolaires et de recherche accordent à la traite et à l'esclavage la place qu'ils méritent.
Je l'ai dit souvent car je le crois profondément : notre pays s'honore d'avoir été le premier à caractériser clairement l'esclavage non pas comme un crime inhumain mais comme crime contre l'humanité. La France a tout à perdre d'une lecture révisionniste de son passé et tout à gagner d'une histoire partagée qui l'arme pour les combats d'aujourd'hui et de demain.
Je me souviens d'en avoir parlé avec Aimé Césaire, à Fort de France, lui qui affirmait en 1982 à la tribune de l'Assemblée nationale, combien il est important pour tous les Français « de se rappeler que le combat, le séculaire combat pour la liberté, l'égalité et la fraternité, n'est jamais entièrement gagné et que c'est tous les jours qu'il vaut la peine d'être livré ».
Il rendit à cette occasion un bel hommage à Victor Schoelcher, artisan majeur de l'abolition définitive de l'esclavage en 1848, soulignant que le même mouvement l'avait porté, sa vie durant, à vouloir l'émancipation des esclaves et celle des ouvriers « victimes désignées d'un capitalisme sauvage ».
Mais nous voulons aussi, ajoutait Césaire, que soit célébré le souvenir de ceux qui ne se résignèrent jamais et se levèrent périodiquement contre l'asservissement esclavagiste.
En ce 10 mai 2010, souvenons-nous qu'ils étaient nos frères et nos soeurs ces esclaves déportés d'Afrique qui, par tous les moyens, résistèrent à leur déshumanisation et à leur marchandisation. Ces hommes et ces femmes qui se jetèrent à la mer durant la traversée des bateaux négriers, Ces « marrons » qui s'évadèrent des plantations pour vivre libres. Ces esclaves révoltés qui s'emparèrent des idéaux de 1789 et anticipèrent la première abolition de 1794.
Et aussi Louis Delgrès et les siens, dressés en 1802 contre le rétablissement par Bonaparte de l'esclavage en Guadeloupe. Dans la belle Proclamation de Basse Terre publiée le 10 mai 1802, Delgrès en appelle « à l'univers entier » et rappelle à ceux qui trahissent la République que « la résistance à l'oppression est un droit naturel ». Encerclés par les troupes venues les remettre dans les fers, ils choisirent la mort plutôt que la servitude.
A leurs côtés, des femmes. Parmi elles, la Mûlatresse Solitude, exécutée après la naissance de son enfant, et Marthe-Rose, blessée au combat, qu'on conduisit à la mort sur un brancard.
La répression de cette insurrection républicaine fut sanglante.
Il fallut bien des luttes encore et le développement du mouvement abolitionniste pour que la République issue de la Révolution de 1848 abolisse définitivement l'esclavage.
Si j'évoque la mémoire des résistants d'alors, c'est pour rappeler que l'abolition ne fut pas un cadeau octroyé mais une conquête, fruit d'une double lutte menée, dans les outre-mers et dans l'Hexagone, par les esclaves eux-mêmes et par les ennemis de l'esclavage.
Nous savons qu'après la fin de l'esclavage vinrent d'autres formes de domination : le travail forcé, la citoyenneté inachevée car prise dans le carcan colonial, les espoirs déçus de la départementalisation outre-mer et, de nos jours encore, ces discriminations qui défigurent la République.
Mais il ne faut pas, comme le disait sagement Césaire, demander « aux hommes du siècle dernier de résoudre des problèmes qui ne se posaient pas encore à eux ». Ils firent, en leur temps, les choix courageux qui permirent à l'émancipation d'aller de l'avant. D'autres, ensuite, prirent le relais. A nous, aujourd'hui, d'approfondir le chemin qu'ils ont ouvert.
Voilà pourquoi il est important de garder vive la mémoire d'un crime dont Frantz Fanon, dans « Peau noire, masques blancs » a admirablement décrit les ravages sur ses victimes et sur ses auteurs : « Le malheur de l'homme de couleur est d'avoir été esclavagisé. Le malheur et l'inhumanité du Blanc sont d'avoir tué l'homme quelque part ». Il disait aussi : « je ne suis pas esclave de l'esclavage qui déshumanisa mes pères » car « moi, l'homme de couleur, je ne veux qu'une chose : que jamais l'instrument ne domine l'homme. Que cesse à jamais l'asservissement de l'homme par l'homme ».
Voilà pourquoi il est important de transmettre aux jeunes générations les repères solides d'un récit partagé et citoyen qui ne gomme pas les blessures profondes laissées par quatre siècles de traite et d'esclavage mais rende, dans le même temps, pleinement justice aux combattants et combattantes passés des droits humains et à la richesse actuelle d'une culture française forte de tous ses métissages. L'école et les programmes scolaires ont, ici, le premier rôle. Car il ne s'agit pas de concurrence des mémoires mais de valeurs universelles.
Voilà pourquoi, aussi, nous avons quelques raisons supplémentaires d'assumer à l'égard du peuple haïtien, si durement frappé par le terrible séisme de janvier dernier, un devoir de solidarité qui n'oublie pas la contribution apportée à l'histoire de l'humanité par ce pays qui se dressa, à l'appel de Toussaint Louverture, pour « déraciner l'arbre de l'esclavage » et où, comme l'écrit Césaire dans le Cahier d'un retour au pays natal, « la négritude se mit debout pour la première fois et dit qu'elle croyait à son humanité ».
En Poitou-Charentes et tout particulièrement à La Rochelle qui fut un grand port négrier, le 10 mai est un moment fort où l'on peut prendre la mesure du rôle que joua le système esclavagiste dans l'économie du territoire et l'édification des fortunes locales des armateurs et des industriel du sucre. Durant sept mois, de mars à septembre 2010, des débats, des conférences, des expositions, des publications permettent aux habitants de la région de s'approprier cette histoire et aux scientifiques de faire un bilan des connaissances disponibles tout en promouvant de nouvelles recherches.
Ce capitalisme négrier dont la région porte l'empreinte eut ses dissidents : au 18ème siècle, Léon-Robert de l'Astran, humaniste et savant naturaliste mais également fils d'un armateur rochellais qui s'adonnait à la traité, refusa que les bateaux qu'il héritait de son père continuent de servir un trafic qu'il réprouvait.
En ce 10 mai 2010, je tiens à faire le lien entre ces deux émancipations que furent, à plus d'un siècle de distance, l'abolition définitive de l'esclavage et les indépendances africaines dont on célèbre cette année le cinquantenaire.
Nous savons bien, et les Africains mieux que nous, que ces affranchissements de la tutelle coloniale française n'ont, comme le pressentait lucidement Frantz Fanon, pas exaucé toutes les espérances de ceux qui combattirent pour la libération de leur pays. D'autres sujétions prirent le relais. Economiques, politiques et sociales. Le Nord, en général, et la France, en particulier, en portent une part de responsabilité. Ce ne fut pas la fin de l'histoire mais le commencement d'une autre et, avec elle, d'autres combats.
Mais je n'ai pas, vous le savez, de l'Afrique une vision misérabiliste car je sais combien elle recèle de talents, d'énergies, d'intelligences, de solidarités pour tracer son propre chemin et construire, à égalité, ce monde nouveau dont nous ressentons l'urgence.
J'ai dit à Dakar, le 7 avril 2009, combien nos destins étaient liés, pour le pire, parfois, dont témoigne notre passé mais surtout pour le meilleur, à bâtir ensemble.
J'ai dit, à Dakar, que nous avions le devoir de poser des mots justes sur ce qui fut, un devoir de vérité. C'est pourquoi elles n'auraient jamais dû être prononcées au nom de la France, ces paroles humiliantes d'un Président aveugle à l'histoire de l'Afrique et à sa contribution de longue date à l'histoire du monde.
J'ai dit, à Dakar, ma conviction que ce siècle serait celui du continent africain.
La mondialisation esclavagiste a été défaite.
La mondialisation colonialiste a été défaite.
La mondialisation de la finance prédatrice le sera à son tour si nous en avons le courage, à commencer par celui d'aller contre les idées reçues, les modèles éculés et les égoïsmes dépassés.


Amitiés fidèles, 
Ségolène Royal
Présidente de "Désirs d'Avenir"

9 mai 2010

Régionales 2010 : un appel au dépassement article-point-presse-du-6-mai-2010.jpg Photo Nouvelle République PARTI SOCIALISTE Fédération de la Vienne POINT DE PRESSE DU 6 MAI 2010 Les élections régionales de mars 2010 ont été marquées par deux caractéristiques : - un score historique de la gauche, particulièrement en Poitou-Charentes et dans la Vienne : tous les cantons sans exception ont voté majoritairement Ségolène Royal au second tour, 35 sur 38 au premier tour. Près de 2 électeurs sur 3 ont voté pour la gauche rassemblée, après avoir donné à Ségolène Royal 10 points de plus que la moyenne nationale au premier tour. - une abstention très forte, un peu moins dans notre région qu’en moyenne nationale, mais malgré tout près de la moitié des électeurs ne se sont pas déplacés. Aussi ce scrutin sonne-t-il comme un double appel : - un appel à la gauche de la part des votants - mais aussi un appel d’une grande partie du corps électoral, qui perd confiance dans la capacité du politique et des élus d’apporter des réponses à leurs attentes, et qui pour une bonne part avait cru dans la « rupture » annoncée par Nicolas Sarkozy et maintenant se sent flouée. Face à cela, le Parti Socialiste doit se dépasser pour éviter deux écueils : • la peur de ne pas être crédible peut conduire à un projet « plan-plan », catalogue de vieilles recettes dans lequel nos concitoyens ne verraient qu’une variante de l’existant • la fuite en avant dans des promesses intenables qui ne ferait que creuser le fossé entre société et politique. Il est nécessaire à la fois de faire une remise en cause fondamentale d’un système qui ne génère que déclin économique, chômage, injustice, tensions sociales et dégâts écologiques, et de jeter les bases d’une reconstruction concrète qui soit solide et lisible pour la population. Il est nécessaire de rassembler très largement tous les citoyens qui aspirent à ce changement. La présence très majoritaire de la gauche dans les collectivités régionales et locales nous en offre l’occasion. Par exemple, le nouveau modèle économique, écologique et social préfiguré par la Région Poitou-Charentes est une référence crédible et pourtant par certains aspects révolutionnaire. Un exemple tiré de la presse de ces dernières semaines montre bien que ce dépassement est possible. Le Front de Gauche a conditionné sa participation aux exécutifs dans les régions Nord-Pas de Calais et Limousin, à trois engagements : - Exiger que la région adopte une clause de conditionnalité sociale et écologique pour ses aides et subventions aux entreprises - Un grand service public de la formation professionnelle rompant totalement avec la logique des appels d'offre aux organismes privés - La création d'un comité régional de planification écologique doté de moyens. Ces trois conditions correspondent à des mesures déjà mises en œuvre en Poitou-Charentes entre 2004 et 2010. Le Front de gauche n’aurait pas eu à poser ce type de conditions s’il avait pu être présent dans une fusion avec les socialistes et Europe-Ecologie. Et ces éléments de bilan, jugés très avancés par le Front de Gauche, n’a pas empêché un certain nombre de centristes de rejoindre Ségolène Royal dès le premier tour, comme il n’a pas retenu le monde rural, traditionnellement enclin à voter à droite, dans son soutien massif à la présidente sortante. Aujourd’hui, dans un pays surendetté et incapable de financer correctement les retraites et la protection sociale, dans un pays qui s’appauvrit et laisse mourir son industrie, le principal enjeu est la création de richesse. En Poitou-Charentes, sous l’impulsion du conseil régional et d’autres collectivités, et grâce à des acteurs économiques et sociaux de talent, d’autres modes de développement sont en train d’émerger. Un système économique basé sur la priorité aux ressources locales renouvelables se construit : énergies renouvelables, valorisation du végétal, circuits courts, lait équitable, etc… Face au déclin industriel, les emplois de demain commencent à apparaître dans les technologies vertes, les véhicules électriques, l’alimentation biologique, … De plus en plus nombreux sont les salariés qui reprennent leur entreprise sous forme de SCOP. C’est ce message d’espoir que nous faisons passer au plan national à l’occasion de la convention nationale du PS sur le nouveau modèle économique, écologique et social. La fédération de la Vienne avait tenu en novembre 2009 des assises sur ce thème et débattra le 6 mai du texte national à partir des témoignages d’acteurs régionaux engagés dans ce nouveau modèle. Jean-François Macaire Premier secrétaire fédéral Article paru dans la Nouvelle République

PARTI SOCIALISTE
Fédération de la Vienne

 
POINT DE PRESSE DU 6 MAI 2010

Les élections régionales de mars 2010 ont été marquées par deux caractéristiques :
- un score historique de la gauche, particulièrement en Poitou-Charentes et dans la Vienne : tous les cantons sans exception ont voté majoritairement Ségolène Royal au second tour, 35 sur 38 au premier tour. Près de 2 électeurs sur 3 ont voté pour la gauche rassemblée, après avoir donné à Ségolène Royal 10 points de plus que la moyenne nationale au premier tour.
- une abstention très forte, un peu moins dans notre région qu’en moyenne nationale, mais malgré tout près de la moitié des électeurs ne se sont pas déplacés.
 
Aussi ce scrutin sonne-t-il comme un double appel :
- un appel à la gauche de la part des votants
- mais aussi un appel d’une grande partie du corps électoral, qui perd confiance dans la capacité du politique et des élus d’apporter des réponses à leurs attentes, et qui pour une bonne part avait cru dans la « rupture » annoncée par Nicolas Sarkozy et maintenant se sent flouée.
 
Face à cela, le Parti Socialiste doit se dépasser pour éviter deux écueils :
• la peur de ne pas être crédible peut conduire à un projet « plan-plan », catalogue de vieilles recettes dans lequel nos concitoyens ne verraient qu’une variante de l’existant
• la fuite en avant dans des promesses intenables qui ne ferait que creuser le fossé entre société et politique.
 
Il est nécessaire à la fois de faire une remise en cause fondamentale d’un système qui ne génère que déclin économique, chômage, injustice, tensions sociales et dégâts écologiques, et de jeter les bases d’une reconstruction concrète qui soit solide et lisible pour la population.
Il est nécessaire de rassembler très largement tous les citoyens qui aspirent à ce changement.
La présence très majoritaire de la gauche dans les collectivités régionales et locales nous en offre l’occasion.
 
Par exemple, le nouveau modèle économique, écologique et social préfiguré par la Région Poitou-Charentes est une référence crédible et pourtant par certains aspects révolutionnaire.
Un exemple tiré de la presse de ces dernières semaines montre bien que ce dépassement est possible. Le Front de Gauche a conditionné sa participation aux exécutifs dans les régions Nord-Pas de Calais et Limousin, à trois engagements :
- Exiger que la région adopte une clause de conditionnalité sociale et  écologique pour ses aides et subventions aux entreprises
- Un grand service public de la formation professionnelle rompant  totalement avec la logique des appels d'offre aux organismes privés
- La création d'un comité régional de planification écologique doté de  moyens.
 
Ces trois conditions correspondent à des mesures déjà mises en œuvre en Poitou-Charentes  entre 2004 et 2010. Le Front de gauche n’aurait pas eu à poser ce type de conditions s’il avait pu être présent dans une fusion avec les socialistes et Europe-Ecologie. Et ces éléments de bilan, jugés très avancés par le Front de Gauche, n’a pas empêché un certain nombre de centristes de rejoindre Ségolène Royal dès le premier tour, comme il n’a pas retenu le monde rural, traditionnellement enclin à voter à droite, dans son soutien massif à la présidente sortante.
 
Aujourd’hui, dans un pays surendetté et incapable de financer correctement les retraites et la protection sociale, dans un pays qui s’appauvrit et laisse mourir son industrie, le principal enjeu est la création de richesse.
 
En Poitou-Charentes, sous l’impulsion du conseil régional et d’autres collectivités, et grâce à des acteurs économiques et sociaux de talent, d’autres modes de développement sont en train d’émerger. Un système économique basé sur la priorité aux ressources locales renouvelables se construit : énergies renouvelables, valorisation du végétal, circuits courts, lait équitable, etc… Face au déclin industriel, les emplois de demain commencent à apparaître dans les technologies vertes, les véhicules électriques, l’alimentation biologique, … De plus en plus nombreux sont les salariés qui reprennent leur entreprise sous forme de SCOP.
 
C’est ce message d’espoir que nous faisons passer au plan national à l’occasion de la convention nationale du PS sur le nouveau modèle économique, écologique et social. La fédération de la Vienne avait tenu en novembre 2009 des assises sur ce thème et débattra le 6 mai du texte national à partir des témoignages d’acteurs régionaux engagés dans ce nouveau modèle.

Jean-François Macaire
Premier secrétaire fédéral

 
Article paru dans la Nouvelle République et Centre presse

8 mai 2010

Pass contraception : Ségolène Royal revient à la charge

Ségolène Royal le 28 juin 2008 à la Maison de la chimie (Audrey 
Cerdan/Rue89).
En novembre, Luc Chatel, ministre de l'Education nationale, avait interdit la distribution du Pass contraception dans les lycées du Poitou-Charentes. Confortée par le préoccupant rapport de l'Igas sur la prévention des grossesses non désirées, Ségolène Royal distribue le Pass aux médecins généralistes.
La présidente de la région Poitou-Charentes a adressé le 24 avril à Nicolas Sarkozy les mille premières signatures d'une pétition exigeant l'autorisation de la distribution du Pass contraception par les infirmières scolaires.
En novembre 2009, le lancement de ce « chéquier », qui donne droit à une première consultation gratuite chez le médecin et à six mois de contraception orale, avait fait des remous. Arguant que « l'Education nationale n'a pas à se substituer au Planning familial », le ministre de l'Education Luc Chatel avait interdit le dispositif.

Le rapport de l'Igas change la donne

Un rapport alarmant de l'Igas (Inspection générale des affaires sociales) sur la prévention, la contraception et l'IVG, rendu public en février, pourrait avoir rendu le terrain plus favorable à la proposition de Ségolène Royal.
L'Igas rapporte des chiffres préoccupants :
« On constate depuis 2002 une progression significative du nombre des IVG chez les mineures dont le taux de recours à l'IVG est passé de 8,9 à 11,5 pour mille [en 2006, ndlr]. »
Le rapport évoque les difficultés d'accès des jeunes à la contraception :
« Ces centres [du Planning familial, ndlr] sont loin d'être accessibles partout et à tout moment : la densité des implantations varie fortement selon les départements et laisse à découvert nombre de territoires ruraux.
[…] Pour les jeunes […], le prix de la consultation médicale constitue un réel problème.
De plus, pour ceux qui n'ont pas de couverture sociale autonome, le remboursement de la consultation entre en conflit avec la confidentialité souhaitée vis-à-vis des parents. »
Pour Marie-Pierre Martinet, secrétaire générale du Planning familial, la publication du rapport a toutes les chances de servir la cause de Ségolène Royal.
« Le rapport de l'Igas a tiré la sonnette d'alarme en pointant les nombreuses insuffisances en terme de prévention et de contraception.
C'est une institution sérieuse. Les politiques seront désormais plus sensibles à ce type de proposition. »
Outre le soutien du Planning familial, et celui d'une des deux principales fédérations de parents d'élèves, Ségolène Royal peut désormais compter sur l'appui de Simone Veil, symbole majeur de la lutte pour les droits des femmes. L'ex-ministre de la Santé, à l'origine de la loi autorisant l'IVG en 1974, a déclaré début mars :
« Les Pass contraception de Ségolène Royal me semblent constituer une initiative intéressante. […] Les adolescentes sont souvent démunies, ce qui est fait à l'école n'est pas suffisant. »

Contourner l'interdiction en distribuant les Pass aux médecins

Décidée à utiliser le dispositif coûte que coûte, Ségolène Royal a décidé de confier son application aux médecins. Chacun des 1 700 généralistes de la région recevra prochainement cinq exemplaires du Pass contraception.
Le 8 mars dernier, lors de la journée de la femme, Ségolène Royal déclarait :
« Nous avons décidé de récupérer les chèques contraception qui sont dans les lycées et de les mettre à disposition des médecins-généralistes en milieu rural et urbain. Nous avons leur accord. »
Philippe Boutin, président de l'Union régionale des médecins libéraux de Poitou-Charentes confirme :
« On ne peut pas être contre le principe ! Mais venir consulter reste un obstacle pour une partie de la population. Le dispositif doit être mis en place dans d'autres structures : au lycée, par exemple ! »
Le Pass contraception pourrait également faire école. Inscrit sur le programme commun du PS lors des élections régionales, il commence à être « copié » plus ou moins fidèlement dans d'autres régions.
En Haute-Normandie, un projet similaire -le Pass prévention-contraception- a été lancé par Charlotte Goujon, une jeune colistière du président Alain Le Vern, lors de la campagne des régionales. Elle ne fait pas partie des élus, mais Charlotte Goujon l'affirme :
« Le Pass verra tout de même le jour à la rentrée prochaine, en espérant que le gouvernement évoluera sur le sujet d'ici-là. »
En Ile-de-France, l'équipe de Jean-Paul Huchon confirme travailler activement sur leur propre Pass contraception. Il fera l'objet d'un rapport et d'un vote le 17 juin lors de la première séance plénière du conseil régional depuis les élections.
Pour prévenir une interdiction, le président de la région a pris les devants, en écrivant aux recteurs des trois académies franciliennes pour obtenir leur accord. Des « solutions alternatives » sont également à l'étude.
Photo : Ségolène Royal le 28 juin 2008 à la Maison de la chimie, lors de la présentation de sa contribution « Combattre et proposer » (Audrey Cerdan/Rue89).

Sordide

Philippe Frémeaux | Alternatives Economiques n° 291 - mai 2010
La façon de faire du gouvernement sur le dossier des retraites n'est acceptable ni dans sa méthode
ni dans ses objectifs. Côté méthode, l'Etat revient une fois de plus sur ses engagements.
Souvenez-vous, en 2003, le ministre des Affaires sociales d'alors, un certain François Fillon, avait
fait adopter une réforme qui prévoyait une clause de revoyure tous les cinq ans, afin d'ajuster les
paramètres des régimes. Après un premier rendez-vous en 2008, le second devait donc intervenir
en 2013. Et voilà que début 2010, le président nous explique qu'il y a urgence, que la crise a
bouleversé la situation et qu'il faut "sauver les retraites", ce qui, dans la novlangue du pouvoir,
signifie réduire une fois de plus les droits des futurs retraités.
Il y aurait donc urgence absolue à agir pour assurer l'équilibre des régimes de retraite en 2020,
voire 2050? Evidemment non. En fait, le gouvernement entend profiter des déficits actuels, liés à
la baisse des rentrées de cotisations sociales provoquée par la crise, pour dramatiser l'enjeu à long
terme et imposer de nouvelles mesures restrictives, en sus de toutes celles adoptées depuis 1993.
Ce faisant, il poursuit aussi un but plus immédiat, et plus légitime: témoigner de sa volonté
d'équilibrer les comptes des régimes sociaux afin de préserver le crédit de la France, alors que la
dette publique devrait dépasser 80% du PIB cette année.
Le problème est que, pour atteindre cet objectif, le moyen choisi est de couper dans les dépenses,
en s'interdisant toute hausse des prélèvements. Le parallèle s'impose ici avec la poursuite des
coupes claires dans les effectifs de la fonction publique et le refus de toute remise en cause des
cadeaux fiscaux faits aux plus aisés depuis 2002.
Résultat: la priorité va sans doute être donnée à un report de l'âge légal de la retraite à 62, voire 63
ans. Contraindre les salariés à demeurer en poste, y compris ceux qui ont déjà cotisé le nombre
d'annuités requises, permet en effet de réduire rapidement le coût global des retraites. La mesure
est d'ailleurs plébiscitée par le patronat, qui réclame un report rapide de l'âge de départ à 65 ans,
tout en continuant de pousser dehors les salariés âgés… Elle présente juste un petit défaut: elle
pénalise tout particulièrement les salariés les moins bien lotis, ceux qui ont commencé à travailler
très jeunes, dont l'espérance de vie est la plus faible et qui, arrivés à 60 ans, ont souvent déjà cotisé
bien plus de quarante années. Un report de l'âge de la retraite serait en outre assez sordide dans la
conjoncture actuelle, puisqu'une majorité de salariés sont hors l'emploi à 60 ans. Reporter leur âge
de départ revient à les maintenir plus longtemps dans la précarité, afin d'empocher la différence
qui sépare le montant de leurs futures pensions et les maigres revenus de remplacement auxquels
ils accèdent aujourd'hui, au titre du chômage ou de l'invalidité. Quant à ceux qui sont encore en
emploi, leur maintien en poste deux ou trois années de plus va pénaliser les jeunes, déjà très
nombreux à fréquenter Pôle emploi.
Il ne suffit certes pas de faire payer les riches pour équilibrer les retraites à long terme, mais il est
totalement inacceptable qu'on demande aux seuls pauvres de supporter l'ajustement que la crise a
rendu nécessaire.
Philippe Frémeaux | Alternatives Economiques n° 291 - mai 2010

7 mai 2010

Port de la burqa: le PS va déposer une proposition de loi inspirée des conclusions du Conseil d'Etat

Le Parti socialiste va déposer une proposition de loi qui s’inspirera des recommandations du Conseil d’État. Sur un tel sujet, il serait particulièrement dangereux et risqué que la loi votée par le Parlement se révèle anticonstitutionnelle. Rappelons que les risques qui pèsent sur le gouvernement, sont de 2 ordres :  
Que cette loi soit rejetée par le Conseil constitutionnel, car il n’y a pas eu de loi d’interdiction générale depuis cinquante ans, ce que le Conseil d’État a mentionné de manière assez précise. Même si le Parti socialiste ne déposait aucun recours devant le Conseil constitutionnel, il faut savoir que désormais avec la réforme de la constitution, lorsqu’un contentieux naît de l’application d’une loi, un citoyen peut saisir le Conseil constitutionnel. On peut penser qu’avec une loi de type, avec les enjeux politiques qui existent notamment dans la frange radicale des islamistes, il est fort probable qu’au premier contentieux ce soit les islamistes eux-mêmes qui déposent un recours avec les conséquences que vous pouvez imaginer. Quel effet si cette loi construite par le gouvernement, pour préserver les intérêts de la République, se révélait en contradiction avec la constitution. C’est pourquoi, nous préférons nous fonder sur les recommandations du Conseil d’État. 
Ajoutons que toute analyse de la jurisprudence avec la Cour européenne des droits de l’Homme, montre qu’elle a toujours privilégié l’autonomie des individus.  On est en droit de penser que cette loi d’interdiction générale serait en contradiction avec la Cour européenne et risquerait la censure.
Cette loi est avant tout politique et cherche moins à s’attaquer au problème. Nous préconisons une loi conforme à l’intérêt général, avec l’objectif que celles qui portent le voile, l’abandonnent, selon des fondements juridiques acceptables.  
Dans le 2ème article du projet du gouvernement, qui illustre en quoi c’est une loi d’opportunité, le gouvernement prévoit un article qui punirait les hommes qui obligeraient les femmes à porter la burqa, par la violence, la menace ou l’abus de pouvoir d’autorité, de 15 000 euros d’amende et d’un an d’emprisonnement. On crée donc un délit spécifique, avec une peine spécifique, avec un dispositif qui est pourtant en deça de la loi actuellement en vigueur. L’article 222-13 du code pénal prévoit 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende pour les violences commises pour son conjoint, les violences verbales suffisant à cette condamnation, et l’article 222-18 prévoit les mêmes peines en cas de menaces ou des violences quand la menace est assortie d’une condition, comme l’injonction de porter le niqab sous peine de violence. Cela ne signifie pas que nous devons être dans une sorte de surenchère, mais illustre tout simplement que le gouvernement a fait son projet de loi avec des objectifs politiques qui se préoccupent assez peu des conditions d’application, mais plutôt du bénéfice électoral que pourrait en tirer le président de la République. Nous pensons qu’il s’agit d’un sujet sérieux. Dès lors que le gouvernement a fait appel à l’expertise du Conseil d’État, qui déclare que les fondements juridiques son incertains, il faut rechercher l’efficacité.