Mobiliser la confiance des Français en leur donnant une espérance
Depuis la fin des 30 glorieuses, la participation électorale n’a cessé de s’éroder. Après un renouveau notable à l’élection présidentielle de 2007, elle est retombée à un niveau historiquement bas lors des dernières élections européennes et régionales.
Je ne crois ni à un phénomène passager, ni à un manque de civisme. Cette non-participation est assumée par beaucoup de Français comme un geste politique, un message de défiance à l’égard de l’ensemble de la classe politique. Les milieux qualifiés de « classe dirigeante » sont considérés par une masse de Français comme une sorte de caste principalement préoccupée par sa propre reproduction, mêlant dans une certaine complicité hommes politiques, magnats de la finance et stars de l’audiovisuel. Huit années d'exercice du pouvoir par la droite, particulièrement les trois dernières années, n'ont fait qu'amplifier ce phénomène.
Chaque évènement d’actualité apporte de l’eau au moulin de la défiance à l’égard du pouvoir en place : les hyper profits et les primes scandaleusement excessives, le bouclier fiscal qui protège les plus riches, la crise financière qui débouche sur une crise économique ravageuse pour les travailleurs tout en enrichissant les spéculateurs, et en même temps le démantèlement des services publics et le recul du droit à la retraite opérés au nom de la rigueur financière !
En dépit des efforts réalisés pendant les périodes où la gauche a gouverné, nous peinons à convaincre de notre capacité à changer le cours des choses. Le peuple prend ses distances, il se tait mais n’en pense pas moins. Il se tourne vers d’autres formes de citoyenneté ou se résigne, faute de mieux et en attendant mieux.
Cette espérance, c'est au parti socialiste de la porter.
Prendre appui sur l'énergie et sur la volonté de changement des Français
Si nos institutions politiques n’ont pas beaucoup changé depuis 50 ans, la société, elle, s’est profondément transformée. L’engagement militant au long cours de nos aînés a fait place, chez les plus jeunes, à d’autres formes d’engagements, moins globalisantes et plus ponctuelles. Ils privilégient plutôt une cause (environnementale, sociale, ou encore humanitaire) qui les touche à un moment donné. Ils sont capable de se mobiliser massivement pour une élection lorsqu’ils y voient un espoir (comme lors de la Présidentielle de 2007) et de s’abstenir tout aussi massivement aux scrutins suivants.
Les réseaux sociaux, fonctionnant dans l’immédiateté de l’accès à l’information sur les smart-phones, deviennent des vecteurs forts. Ils recouvrent aussi des réseaux réels très actifs. Chaque phénomène social suscite dans la société une réaction collective : contre la nouvelle pauvreté et le chômage des masse, les centaines de milliers de bénévoles des associations de solidarité, d’insertion et de promotion des droits de l’homme ; contre les atteintes à l’environnement, des associations de défense qui naissent un peu partout ; face à la disparition des services publics, dans le monde rural et dans les quartiers populaires, des réponses nouvelles souvent portées par les élus locaux, les acteurs culturels, les mouvements d’éducation populaire ; etc.
Pourquoi faudrait-il désespérer de notre société, entonner le refrain de l’indécrottable conservatisme du peuple, du « c’était mieux avant ! », alors que nous voyons sous nos yeux, bien au contraire, toutes ses ressources, toutes ses capacités de réaction et d’action qui se mettent à l’œuvre ?
Un renouveau est nécessaire, il nous faut proposer un nouveau contrat social, librement accepté par des individus très largement informés, sans s’enfermer dans la nostalgie d’un Etat-providence qui fonctionne mal. Désormais la démocratie ne saurait vivre sans être participative.
Inventer une nouvelle ère de la démocratie, notamment avec la démocratie participative
Dès lors, que faire pour stopper la dérive actuelle, combler le fossé qui s’élargit entre le peuple et les élites économiques et politiques ? Pour ma part, je mise sur deux révolutions institutionnelles : une véritable décentralisation et la mise en œuvre effective de la démocratie participative.
Une France active, entreprenante et solidaire ne peut pas exister sans la confiance de citoyens acteurs et mobilisés. Une démocratie confisquée ne peut produire que scepticisme et rejet. Les forces de l’innovation et de la créativité ne seront pleinement mises en œuvre que si chacun peut, à son niveau et à son rythme, avec ses connaissances et son expertise propres, contribuer à la formation de la décision collective.
C’est dans le cadre de cette conception de la citoyenneté active qu’il faut situer le rôle des élus. Rôle tellement précieux et indispensable à la mise en œuvre des choix collectifs. Des élus puisant leur légitimité non seulement dans le suffrage mais aussi dans la capacité à organiser dans la durée la participation de tous. Parce qu’à l’époque où, comme nous le dit Paul Virilio, « les longues durées perdant leur intérêt au profit de l'instantanéité et de l'immédiateté, l'événement ressenti instantanément devient proéminent », il n’est plus imaginable de ne consulter les citoyens qu’un fois tous les cinq ou six ans à l’occasion des élections.
Cette révolution démocratique doit se prémunir de créer de nouvelles fractures. Elle doit donner à chacun des citoyens la même capacité d’expression, qu’il ait ou non accès à des formes de communication numériques plus ou moins sophistiquées.
Les pratiques locales de démocratie participative existent. Après avoir suscité scepticisme, ironie et critiques, elles fonctionnent sans heurts et avec l'adhésion des citoyens. En Poitou-Charentes, depuis, 2005, forums participatifs, budget participatif des lycées et jurys citoyens donnent la parole aux habitants, leurs permettent de participer à l'élaboration des décisions qui les concernent, d'évaluer et de donner leur avis sur les politiques déjà mises en oeuvre.
Ce nouveau fonctionnement démocratique ne sera pas sans conséquences sur les partis politiques. Ceux-ci sont bien souvent considérés comme étant seulement des antichambres du pouvoir. En devenant des lieux d’éducation populaire, en s'ouvrant très largement à la société, en permettant à leurs membres de mieux vivre la participation démocratique, ils trouveront une assise démocratique plus large.
Faire du parti socialiste une force efficace pour battre la droite et sortir la France de la crise
Nous devons faire du Parti socialiste le grand parti démocratique, populaire, du mouvement et de la mobilisation sociale dont la France a besoin.Le Parti socialiste doit être fidèle à ses valeurs. C’est pour lui le meilleur chemin pour s’adapter. Fidèle à ses idéaux de construction, il doit savoir assumer les tâches d’un parti de gouvernement et être l’agent actif des mobilisations sociales face à la droite.
Il est la force indispensable, irremplaçable. Il ne doit pas être seulement l’instrument du pouvoir, mais un outil permanent de la démocratie y compris et surtout lorsque l’on est au pouvoir. Il doit être un laboratoire social, un lieu de confrontations et de convergences des idées, ouvert aux autres, à la société, à ses alliés.
Cette révolution démocratique, le Parti Socialiste doit commencer par se l’appliquer à lui-même en améliorant la démocratie militante, en fonctionnant de manière ascendante plutôt que descendante, ce qui passe par le développement de la démocratie participative pour associer en permanence les militants et les sympathisants. Elle confirmera le socialisme et la démocratie dans leur rôle historique d’émancipation, en restituant à chacun une part de pouvoir politique supplémentaire.
Instaurer le mandat parlementaire unique pour favoriser l'accession des femmes à la tête des exécutifs locaux
Pour faire en sorte que chaque citoyen ait la possibilité de devenir élu, le parti socialiste doit tenir bon sur sa volonté de restreindre les règles de cumul et de durée, conformément au vote des militants. Le Parti Socialiste doit montrer l’exemple en décidant d’interdire le cumul d’un exécutif local et d’un mandat parlementaire, y compris celui de sénateur et ce, dès les prochaines élections. L’application de cette règle permettra à des femmes d’accéder à la tête de régions, de départements et de villes. Le parti socialiste doit également limiter dans le temps les mandats.
Concernant la parité et le renouvellement, ainsi que la diversité de notre représentation politique, les propositions du rapport d’Arnaud Montebourg vont dans le bon sens. La force du parti socialiste tient à sa capacité à s’ouvrir en permanence sur l’extérieur. Il doit être le lieu où les hommes et les femmes, les jeunes et les anciens, les Français de toutes les origines, de tous les talents et de tous les métiers, de toutes les singularités et de toutes les générosités se retrouvent. Il doit être un véritable reflet de la société française.
Comment un parti politique peut-il être crédible pour la conduite de la nation s’il n’est pas lui-même exempt de tout soupçon dans les scrutins qu’il organise ? Quelle peut être sa crédibilité s’il n’est pas meilleur dans son fonctionnement que la société qu’il prétend réformer ?
L’histoire récente du Parti Socialiste montre la nécessité de se doter de règles éthiques telles que proposées dans le rapport d’Arnaud Montebourg.
Des primaires ouvertes et transparentes :un tournant historique pour rénover le parti socialiste et déclencher un mouvement populaire
Depuis toujours, j'ai défendu cette idée et je me réjouis que le rapport d'Arnaud Montebourg lui donne toute son ampleur.
C'est en effet une chance que les socialistes doivent saisir. La réussite des primaires sera un des éléments clef de la preuve de la rénovation de notre parti. Un élan populaire lors des primaires donnera un élan à notre candidat(e). En 2006, le vote interne au PS avait attiré à nous environ 200.000 personnes, portant le collège électoral à plus de 300.000. Il faut aller encore plus loin. Associer deux millions au moins de nos concitoyens à la désignation de notre candidat est un objectif tout à fait atteignable.
Et pour que le scrutin soit parfaitement légitime, les garanties de la transparence et de la légitimité du vote doivent être renforcées. L'élection doit être organisée dans les mêmes conditions qu'un scrutin républicain. Pour éviter toute contestation au niveau du recollement des votes au niveau départemental puis national, il est impératif de prévoir dans chaque bureau de vote la publication sur internet des résultats du scrutin immédiatement après le dépouillement et la proclamation. Les résultats devront être transmis de façon concomitante aux échelons départementaux et nationaux. Cela permettra d'éviter toute discordance entre le résultat du bureau, validé par le président, ses assesseurs et les scrutateurs, et les résultats recollés au niveau départemental puis national.
Ségolène Royal soutient le très bon travail accompli par Arnaud Montebourg pour organiser les primaires. Elle a envoyé à Martine Aubry, à sa demande, des propositions par écrit en insistant sur deux points :
1 – Moderniser la transparence du vote des primaires en communiquant en temps réel les résultats sur internet, bureau par bureau, ce qui permet aux électeurs de suivre en direct les résultats.
2 – Appliquer le non-cumul des mandats dès les élections sénatoriales, comme le souhaite Martine Aubry, Arnaud Montebourg et les militants, afin de permettre l’émergence des femmes à la tête des départements, des régions et des grandes villes.
Elle redit sa volonté de soutenir un dispositif gagnant collectif permettant de sortir la France de la crise en mettant fin à la politique inefficace et injuste d’une droite dure qui fait souffrir des millions de Français.
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