Gaëtan Gorce, député de la Nièvre
Secrétaire national à l'exclusion, membre du Conseil national
Rénovons... vraiment!
La rénovation n'est pas un gadget qui se limiterait a l'organisation de Primaires (dont nul n'est sûr à
ce jour qu'elles pourront se tenir). Elle est la condition de la reconquête, le moyen indispensable
par lequel notre parti doit répondre aux nouvelles exigences de la vie démocratique : demande de
participation des citoyens et donc des militants à la décision, transparence accrue du fonctionnement
interne, prise en compte des incidences du quinquennat sur l'équilibre de nos Institutions. Bref, elle
est le gage et la condition de la modernisation et de la démocratisation du Parti socialiste.
1) Pour une stratégie de la rénovation !
La rénovation du Parti socialiste n'a ainsi de sens que si elle est mise au service d'une stratégie. Il
est frappant de voir comment notre parti, outil créé, affûté par François Mitterrand pour la conquête
du pouvoir, s'est progressivement transformé en machine à perdre les élections nationales. Ce
retournement s'explique par l'extrême médiatisation, l'excessive personnalisation de notre système
politique qui a contribué à dévaloriser toutes les autres fonctions.
Mais, reconnaissons-le, le mal est plus profond encore. Ce qui rend nos affrontements internes si
infructueux, c'est qu'ils reposent toujours sur le même schéma, celui fixé, défini, en 1971 à Epinay
et que, contre toute évidence, l'on s'efforce de reproduire ou plus laborieusement d'imiter,
« figeant » paradoxalement pour l'éternité la recette d'un génie de l'adaptation.
Il nous faut aujourd'hui bâtir un autre parti répondant aux conditions de la reconquête. Dans la
France actuelle, l'objectif ne peut pas être dès lors de changer nos procédures simplement parce qu'il
faudrait les changer. Il faut les changer parce qu'elles ne sont plus adaptées au contexte social et
politique ni à la stratégie que nous devons suivre. Sur quelles bases le parti d'Épinay a-t-il bâti son
succès, sinon sur une analyse minutieuse et un instinct non moins sûr, de la situation du pays au
début des années 70 ?
L’union de la Gauche constituait sa caractéristique première par opposition à ceux, qui
nostalgiques de la quatrième République, continuaient à rêver d’une petite fédération réunissant la
Gauche socialiste et le Centre. À la différence de ces derniers, François Mitterrand tirant les leçons
du scrutin majoritaire et de la présidentialisation du régime, s’était convaincu que la Gauche ne
pourrait l’emporter que rassemblée. L’union de la Gauche s’imposait à ce titre, le pari consistant à
1
rééquilibrer puis inverser un rapport de force à l’origine tout à l’avantage du Parti communiste
français. Le cap, fixé très tôt et maintenu contre vents et marées, fut la clé de la victoire.
Cette stratégie allait s’avérer d’autant plus efficace qu’elle était portée par le flot montant des
classes moyennes qui ne pouvaient manquer de se reconnaître dans l’aspiration assumée du PS à
« changer la vie ». L’alternance de 1981 apparaît, avec le recul, comme l’aboutissement politique
d'une suite de transformations économiques, sociales et culturelles (dont Mai 1968 fut le symbole).
Le carcan dans lequel la société française restait pour partie enfermée devait exploser sous la
pression d’une demande d’initiative, d’autonomie et de liberté.
La Gauche sut alors mieux répondre aux attentes des catégories salariées qui avaient vu dans les
années 70 leur nombre exploser, favorisant une mobilité, une promotion sociale inédite à travers
l’accession à un meilleur niveau de vie et de responsabilité de générations entières d’enfants
d’ouvriers, d’employés.
Enfin, la troisième dimension du cycle d’Épinay résidait dans l’organisation méthodique d’un
parti tout entier tourné vers la conquête du pouvoir et mis au service d’un chef dont le
leadership pouvait parfois être contesté, mais pas l’envergure présidentielle.
L’énumération de ces ingrédients qui furent à la base du succès montre combien les temps ont
changé aujourd’hui et que proclamer la fin du cycle d’Épinay ne constitue pas une
provocation mais un simple constat dont il est urgent en revanche de tirer les leçons.
L’environnement économique et social s'est d’abord radicalement modifié. Les fissures
qui commençaient à lézarder le modèle des années 70 se sont encore creusées, la France
connaissant une double révolution en l’espace d’une quarantaine d’années.
À peine achevé, le passage d’une économie rurale à une économie industrielle qui avait mis
plus de 30 ans à se concrétiser, a débouché sur une nouvelle transformation : la tertiarisation de
l’emploi qui s’accompagne du déclin voire de la disparition de pans entiers de grands secteurs
industriels. Le freinage de l’expansion des catégories moyennes est d’autant plus sensible qu’il
s’est accompagné d’une fragmentation des statuts, d’une stagnation du pouvoir d’achat et d’un
blocage de la mobilité sociale et professionnelle. La poussée des médias et des nouvelles
technologies, l’évolution des modes de vie a encouragé une individualisation accrue des
comportements sociaux et politiques. Enfin, la précarisation de l’emploi débouche sur une crise
des modèles traditionnels de solidarité poussant à mettre en cause le poids des prélèvements et la
légitimité de la redistribution. En clair, la France d’aujourd’hui ne ressemble plus en rien à celle
de 1971 ni même à celle de 1981.
Le contexte politique est ensuite bien différent : la Gauche dans ses frontières
traditionnelles est structurellement minoritaire. Et ses alliés potentiellement affaiblis.
L’extrême Gauche antilibérale est dans l’impasse : elle se nourrit certes de l’inquiétude d’une frange
de l’opinion confrontée à la mondialisation ; mais elle est bien incapable de fédérer (la
présidentielle l’a montré, les régionales confirmé) et par conséquent de peser. Et comment imaginer
l’avenir bâti autour d’une vision si incurablement négative de la modernité ? Le refus, la
protestation, la résistance ne font pas une politique. Certainement pas une majorité. Même pas une
alliance.
La solution peut-elle venir « d’ailleurs », pour reprendre l’expression charmante de Michel Jobert
dans les années 70, c’est-à-dire du centre ? Si le Centre du point de vue électoral peut être décisif,
une alliance avec François Bayrou serait au contraire aventureuse puisqu’elle reviendrait à lui
déléguer le soin d’incarner la modernité économique et sociale. Laissons donc de côté cette
chimère !
C’est d’abord sur ses propres forces que le parti socialiste doit compter. Il y sera aidé par la
logique des institutions que favorise la présidentielle. On est passé en 20 ans du fameux quadrille
bipolaire, chaque camp étant composé de 2 cercles concurrents, à un bipartisme imparfait, l’UMP à
droite, le PS à Gauche, s’étant assurés une position dominante.
La question de l'alliance doit passer après celle du projet. C'est celui-ci plus que celle là qui
créera une véritable dynamique. Parce que les Français veulent des solutions !
Et c'est la vocation de notre parti de les construire pour autant qu'il sache s'ouvrir sur de nouvelles
références sociales, culturelles, écologiques.
Cela ne doit pas nous conduire à négliger nos partenaires. Nous devons au contraire les traiter avec
respect. Mais, forts de notre volonté, de nos idées, pas pour leur sous-traiter ce que nous aurons été
incapables d'imaginer !Ce qui doit nous conduire à privilégier une stratégie qui n'ait pas les
alliances comme but, mais pour conséquence. L'enjeu est de créer une dynamique qui permette de
rassembler tant de forces éparses. Le premier acte d'une rénovation réussie devrait être ainsi de
lancement d'Assises de l'Alternance visant à fédérer toutes celles et tous ceux Socialistes, ex
communistes, écologistes, simples citoyens.
Enfin, aucun véritable leadership n'a réussi à s'affirmer, chaque responsable se trouvant obligé de
composer avec des groupes aux intérêts et aux vues contradictoires. Le dernier congrès de Reims en
a fourni une épouvantable illustration. Nous ne pourrons sortir de cette situation que le jour où le
Premier secrétaire sera élu avant le congrès, sur la base la plus large.
2) Transformer le PS en une force moderne et démocratique
Au fond, le Parti socialiste se trouve aujourd’hui un peu dans la situation du parti communiste dans
les années 60 : on ne peut rien faire avec lui mais on ne peut rien faire non plus sans lui.
Son appareil est demeuré rétif à la réforme, incapable de se remettre en question, figé dans ses
archaïsmes et ses querelles. Mais il n’existe pas d’alternative.
Certes le chantier est immense. Et la tâche à conduire exactement à rebours de celle accomplie entre
1971 et aujourd’hui. Le PS n’a pas de leader incontestable : il lui faut donc s’en donner un ! Il est
privé d’alliés sûrs, il lui faudra donc d'abord agir par lui-même ! Il n’est plus porté par le
mouvement de la société, sa foi dans le changement et le progrès : il devra donc se redonner un
projet mobilisateur qui tienne compte des réalités de la société d’aujourd’hui. On peut défaillir
devant l’ampleur du travail à accomplir. On peut aussi y trouver matière à enthousiasme. Plutôt que
simplement placer ses pas dans ceux des grands anciens, c’est un nouveau chemin qu’il faut ouvrir,
un nouveau chapitre qu’il faut écrire.
À ce stade, la question de l’outil est évidemment essentielle. Dans quel état se trouve le parti
socialiste ? Ai-je besoin d’y revenir, tant on l’a laissé rouiller comme un vieux et grand navire,
oublié au bord d’un quai ? Tournons-nous plutôt vers les solutions !
1) D'abord, supprimons les courants, ou, à tout le moins, remettons-les à leur place !
Disons-le tout net, sans langue de bois : le pouvoir au Parti Socialiste est devenu une sorte de rente
à laquelle les bénéficiaires n’ont pas envie de renoncer. Cette rente, ce sont les courants, les
sensibilités, héritiers de vrais débats aujourd’hui dépassés et paravents d’ambitions personnelles
toujours renouvelées. Derrière chaque courant, il y a des places, des avantages à distribuer. La
logique «proportionnelle » sur laquelle ils sont fondés garantit à chacun sa juste part de mandats
locaux, nationaux et européens. Il suffit pour y prétendre, de réunir à un congrès, plus de 5% des
suffrages et la porte s’ouvre sur le grand partage.
Avec de tels appâts, il n’est pas difficile de se faire une clientèle. La constituer, l’entretenir, protéger
ses intérêts demande cependant, face aux appétits des concurrents, une dépense d’énergie, un effort
d’attention, qui ne sont plus disponibles pour les tâches jugées plus ingrates : comprendre les
mutations de notre société, en débattre, faire vivre les idées. Celles-ci ne sont plus que prétextes à
des conflits instrumentalisés selon des rites bien connus, ravivés à chaque congrès. Dans un tel
système, le changement ne peut venir de nulle part. L’on peut sans risque aucun se démarquer le
temps de se constituer un petit capital, sans perdre pour autant sa place dans les instances de
pouvoir. Le vent de la défaite électorale peut bien souffler, comme en 1993 et 1995, et même
redoubler de force et d’intensité comme en 2002 et en 2007, il ne parvient pas à ébranler ces
casemates calfeutrées qui ne laissent pas passer le moindre air frais. La bataille des présidentiables
peut même apparaître sans véritables conséquences dans la mesure où elle n’entraîne pas la perte de
ses véritables joyaux de la couronne socialiste que sont les mandats locaux. On l’aura compris, le
Parti Socialiste, qui rêve d’une sixième République, a succombé depuis longtemps aux délices de la
quatrième.
La solution passe par la suppression ou à tout le moins l'affaiblissement des « courants ». Pourquoi
faudrait-il lier indissolublement la discussion de fond et les enjeux de pouvoir, au point, comme par
le passé, de laisser les seconds cannibaliser la première ? Leur rôle ne doit plus en aucune manière
porter sur à la sélection des candidats, à la direction du parti ou aux fonctions électives qui devront
répondre au contraire à des critères politiques partagés : la promotion des femmes1, la diversité de
manière générale, le renouvellement indispensable à vitalité d’une grande organisation. Ces choix
devront être le fait des militants au scrutin direct, uninominal et majoritaire : un militant, une voix,
un choix ! Et les courants, si l'on veut les conserver, devront être ramenés à leur vocation première :
le débat d'idées. D'où la proposition de les doter d’un véritable statut, de mesurer leur influence aux
parrainages (nombre de militants, de parlementaires) qu’ils pourront recueillir pour se déclarer et
être ainsi représentés dans des commissions nationales qui devraient devenir des forums
permanents, contribuant à nourrir la réflexion du parti et de ses instances.
2) Rendons le pouvoir aux adhérents
Cette modernisation devra s’accompagner, comme un pendant naturel, d’une démocratisation, c’est-
à-dire la mise en place de mécanismes de vote individuel, garantissant la primauté des choix des
membres sur l'autorité des dirigeants. À la méthode surannée des motions, supposée couvrir
tous les sujets, devra succéder un vote par thème, garant de la clarté des orientations politiques et
de l’adhésion des membres. Le PS se veut le représentant d’une nouvelle démocratie et ses modes
de fonctionnement empruntent aux pratiques les plus archaïques de la démocratie représentative.
D’où l’idée de transformer le « Saint-Tropez socialiste » que constitue désormais l’Université de La
Rochelle, en conférence nationale annuelle, lieu de travail et de débat, où le poids des adhérents
serait garanti par un principe simple : un représentant élu par section constituerait cette assemblée
appelée à se prononcer sur la position que prendra le parti sur l’ensemble des dossiers d’actualité.
Dans l'intervalle, des conventions thématiques permettront un vote des militants sur les
orientations constitutives de notre projet politique. Élaborés pas la Direction à partir des travaux des
commissions nationales revivifiées, chaque texte et les éventuels amendements déposés, seront
soumis au suffrage universel des militants.
Cette démocratie directe sera la meilleure manière de garantir la participation de tous, tout en
dépassant l’influence et la captation de pouvoir par les anciens courants et leurs dirigeants. Elle
garantira la continuité de l’axe décisionnel entre un Président du parti issu du choix des militants et
les orientations soumises au vote.
3) Pour un vrai « chef de l'opposition » légitimé par les primaires
Outre les progrès qu’elle ferait connaître à notre démocratie interne, cette formule permettrait enfin
à la Gauche de se doter d’un parti dont l’organisation serait en parfaite adéquation avec ses
objectifs à savoir la conquête de la présidence de la République puis d’une majorité parlementaire.
Le quinquennat a rendu cette mutation plus nécessaire et plus urgente. Devenu un super Premier
ministre, le Président sortant doit trouver en face de lui, pendant la durée de son mandat, comme
lors du scrutin présidentiel, un véritable chef de l’opposition, sûr de son autorité politique, tendant
toutes ses forces vers l’objectif, choisi par un parti dont la base aura été élargie, capable de faire
valoir ses orientations en en appelant aux militants. Appuyé sur un appareil rénové, il partira à la
bataille dans les meilleures conditions, en tout cas bien différentes de celles que connut en 2007
Ségolène Royal.
Le plus surprenant est qu’une telle évolution ne fasse pas l’unanimité. Certains plaident même pour
dissocier la désignation du leader du parti de la désignation de celui qui les représentera à la
présidentielle. Dans le temps, et peut-être même dans les personnes ! J’invite tous ceux qui veulent
travailler à une véritable rénovation, à se défier de cet argumentaire. Qui ne voit tout d’abord qu’il
n’a pour objet que de gagner du temps en faisant d’une opportunité un principe. Là encore, les
présidentiables veulent donner le change. Parce qu’ils ne se sentent pas prêts pour 2010, ils plaident
pour reporter à 2011 un choix auquel ils veulent participer.
Mais, n’avons-nous pas été suffisamment instruits par le précédent de 2006 des effets dilatoires
d’un tel report ? Pouvons-nous imaginer et supporter une nouvelle querelle des chefs, larvée, diluée
dans le temps, qui concentrera l’attention au détriment du travail d’opposition et de la
reconstruction. Et quelle sera l’autorité d’un premier secrétaire privé de la possibilité de se présenter
à la présidentielle ou s’il ne l’est pas, soupçonné de n’agir que dans ce but ? Et quelle sera sa
légitimité s’il devait, au bout du compte, se voir préférer un autre candidat ? Toutes ces expériences,
nous les avons faites. Nous avons vécu ces épreuves, traversé ces crises.
Ne pouvons-nous pas, une fois pour toutes en tirer les leçons ? Tout, l’histoire récente, l’évolution
des institutions, les attentes de l’opinion plaident pour une unité de direction et le choix rapide de
celui ou celle qui devra l’assumer avec pour contrepartie naturellement, d’en rendre compte en cas
d’échec, en abandonnant automatiquement sa « couronne».
D'où la question des primaires qui doivent être le moyen de la transformation souhaitée du parti
socialiste, alors c’est naturellement dans ce sens qu’il faut aller. Celles-ci devront être le plus large
possible si l'on ne veut pas limiter le choix aux seuls personnalités acceptées par leurs pairs, la
candidature doit être ouverte à toute personne soutenue par au moins un parlementaire ou un
membre du conseil national. Et l'élection se déroulera sur un seul tour : qui peut croire qu'un
candidat incapable de créer un élan majoritaire dès le premier tour des Primaires socialistes, qui ne
soit capable de s'imposer qu'après négociations et arrangements, puisse rassembler les Français ? Il
faut faire le pari d'une dynamique ou alors en rester à nos tristes pratiques actuelles !
Enfin, il faut que ces Primaires aient lieu le plus tôt possible, c'est à dire avant la fin de l'année, pour
que celui ou celle qui sera désigné puisse à la fois incarner l'opposition et piloter la rédaction du
projet dans lequel nous serons engagés.
Une telle formule supposerait naturellement qu’à côté de ce Président élu travaille un secrétaire
général qui se consacre exclusivement au Parti et qu’à un conseil national moribond (actuellement
élu sur la base des motions2) soit substitué un forum national élu au scrutin de liste uninominal,
à l'échelle départementale. Ainsi les délégués des militants seraient bien les délégués des
militants !
Notre parti est encore solide : un réseau militant qui couvre tout le territoire et que l’espoir peut
remobiliser comme l’a montré le succès des nouveaux adhérents ; un nombre considérable d’élus
locaux dotés d’une légitimité incontestable auprès de nos concitoyens, doués d’une vraie
compétence et d’une expérience du pouvoir, trop peu sollicités et dont la capacité d’initiative et
d’invention peut s’user sous l’effet du cumul des mandats ; une position électorale enfin,
stratégique, centrale, forte, décisive et que la succession d’échecs n’a pas entamé mais, au contraire
si l’on en juge par la réaction de 2010, renforcé.
Il existe donc un potentiel ! Encore faut-il le valoriser, le renforcer, l’élargir, voire même le dilater.
La cible est claire. Elle est constituée par ses milliers de militants, ses centaines de milliers
d’électeurs en provenance du reste de la Gauche et pour partie du centre, et aujourd’hui en
déshérence. C’est à eux et non aux appareils, qu’il faut d'abord s’adresser.
C’est d’eux que viendra la régénération du parti socialiste. La Gauche en arrive à une nouvelle
étape de son histoire. D’abord républicaine, tout au long du dix-neuvième siècle, puis radicale et
enfin socialiste, elle entre désormais dans une nouvelle ère, qui suppose, comme à chaque étape, le
dépassement de son identité précédente. La nouveauté de la période qui s’ouvre tient peut-être au
fait que jusqu’alors la mue s’était faite au bénéfice de son aile la plus à Gauche, à travers un
processus de radicalisation qui s’est interrompu avec le communisme, marquant mieux encore
l’originalité de la période qui s’annonce. Il ne s’agit plus de céder à la pente naturelle d’un
sinistrisme accentué qui a marqué tout notre vingtième siècle, mais de réussir la synthèse d’un
courant issu de l’économie industrielle, le socialisme, avec ceux issus de sa crise. L’écologie
naturellement mais aussi les mouvements de société comme le féminisme ou ceux pour la diversité
culturelle ou sexuelle ou la lutte des consommateurs...
Il n’y aurait qu’avantage dans ces conditions à faire désigner notre leader en amont d'Assises de
l'Altenative.
5) Inventer un nouveau militantisme
Sur ces bases, l’organisation à construire devra donc être avant et par-dessus tout attractive, c’est-à
dire le contraire d’un appareil coopté malthusien. La formule des adhérents à 20 euros avait en
quelque sorte ouvert la voie.
2
et dont les membres ne peuvent supporter d'y siéger plus de deux heures d'affilée si l'on en juge par l'absentéisme
croissant au fil des discours.
6
Elle doit être renouvelée et même institutionnalisée. L’adhésion doit changer. Elle peut et doit
prendre plusieurs formes comme la citoyenneté moderne qui en est le fondement. À motivation
différente, réponse adaptée.
Pourquoi faudrait-il être choqué que le militantisme traditionnel coexiste avec d’autres formes
d’engagement qui se traduiraient par des contributions ponctuelles mais informées ? Pourquoi le
premier ne devrait-il pas, à défaut d’être professionnalisé, ce qui en changerait la nature, être
organisé et modernisé à l’instar de ce qu’ont fait nos amis du Parti Socialiste ouvrier espagnol par
exemple ? Ceux-ci se sont dotés d’une force militante percutante, facilement mobilisable et utilisant
des méthodes ouvertes de communication : porte à porte systématique, mailing ciblé connecté à des
campagnes d’informations nationales permettant de garantir l’impact et la cohérence du message.
Que la direction du PS ne dispose d’un fichier central de ses adhérents que depuis quelques mois et
toujours pas d’un fichier centralisé des sympathisants, établi pourtant par ses sections et ses élus,
apporte la preuve d’un amateurisme qui n’est plus guère acceptable aujourd’hui. Non pas qu’il
s’agisse de confondre l’organisation d’un grand parti avec celle d’une entreprise, mais simplement
au nom d’un principe simple, qui veut que si l’on croit à ses idées, l’on se donne les moyens de les
faire triompher. Et que dans une société où la communication tient une si grande place, notre
devoir est d’utiliser des techniques modernes à partir desquelles la diffusion de notre message peut
être assurée.
Une telle évolution devra ouvrir sur la création de sections thématiques, en plus des sections
territoriales, pour permettre à celles et ceux qui le souhaitent, d’apporter leurs compétences,
leur expérience et leur contribution à l’approfondissement de la réflexion collective. Une telle
démarche supposera aussi une véritable formation de nos cadres dont un réseau devra pouvoir
organiser, animer les réunions. Se dessinera alors un parti moderne, citoyen, bouillonnant à la base,
offrant à ses membres une vraie capacité de mobilisation et d’expression.
On l’aura compris : la solution que je préconise suppose une rupture. Rupture avec les habitudes
certes d’un parti ankylosé par ses courants, divisé par ses chapelles, en contradiction avec l’objectif
même qu’il s’assigne pourtant ouvertement ; rupture par conséquent avec une règle, la
proportionnelle qui ne sert plus que de prétexte à des ambitions concurrentes.
Ce nouveau militantisme ne serait pas complet s'il ne s'accompagnait d'un renouvellement que
faciliterait l'instauration du mandat unique. Les élus qui se trouveront en situation de cumul à l'issue
des prochaines élections politiques devront choisir entre leurs différents mandats au plus tard en
2014, lors du prochain renouvellement général. Cette rupture, nous devons l'assumer sans
hésitation, elle concrétise le passage d'une époque à une autre. Doté d'un leader choisi par tous les
électeurs de la Gauche, dans le cadre de Primaires organisées avant la fin de l'année, conforté par
des Assises de l'Alternative qui concrétiseront le rassemblement opéré lors des Primaires, appuyé
par une Direction élue par le Congrès au scrutin majoritaire, enrichi par des « sensibilités »
uniquement orientées vers la préparation de conventions thématiques, bases de notre futur projet,
cet autre parti socialiste sera prêt à assumer la relève politique et électorale que nous appelons tous
de nos voeux pour 2012. D'une certaine façon, il est réconfortant de penser que ce changement
dépend de nous autant que du candidat dont nous nous doterons : c'est le prix, et la vertu, de la
démocratie!
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