À moins d'un mois des élections, nous proposons un tour des huit régions à surveiller de près. Aujourd'hui : le Poitou-Charentes. Ségolène Royal doit y réaliser un bon score pour compter sur la scène nationale.
Ségolène Royal sort de la piscine municipale du village de Saint-Aubin-le-Cloud. Direction la maison des associations, puis une chaufferie collective au bois, puis la salle polyvalente, puis une entreprise... La tournée de la candidate est lancée. La présidente sortante de Poitou-Charentes sillonne la région au pas de charge. Elle met l'accent sur deux grands thèmes : l'environnement et les services publics. Le premier flatte son bilan - « Nous avons commencé avant tous les autres, en 2004 », se rengorge-t-elle -, le second jette une ombre sur la politique nationale de la droite.
Le sauvetage d'Heuliez doit aussi être son slogan social. Depuis quelques mois, l'ancienne candidate à la présidentielle se fait silencieuse sur la scène nationale. Pas un mot sur la burqa, la retraite à 60 ans ou sur la vie du PS. C'est que Ségolène Royal bat la campagne. « J'ai toujours donné ma vie à la mission qui m'était donnée », clame-t-elle. Cette mission, depuis 2004, concerne la région Poitou-Charentes. L'ancienne ministre avait posé ici les premiers jalons de son aventure en 2007. Dans le fief de Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre d'alors, elle avait acquis ses premiers galons en battant l'UMP Élisabeth Morin. Aujourd'hui, Poitiers pourrait encore servir de tremplin.
Présidence verte
En six ans, l'hôtel de région est devenu le bastion de « la présidente », la région son fief. Le tout devenant un laboratoire pour les propositions de la socialiste. Dernière expérimentation en date : l'ouverture à tous les partenaires. Alors que la rue de Solférino tergiverse, Ségolène Royal a tendu la main à toute la gauche, jusqu'au MoDem. Des places éligibles ont été réservées à cinq centristes et à trois Verts. « L'urgence sociale, économique et écologique fait qu'on n'a plus le temps de se compter », souligne-t-elle, exhortant à l'unité dès le premier tour. La main tendue pourrait se replier au soir du 14 mars.
Les Verts, alliés depuis 2004, ont choisi l'autonomie. Pourtant, le bilan écologique du dernier mandat est bon. « La politique environnementale est très consistante », se satisfait la vice-présidente Verte chargée de l'environnement, Marie Legrand, qui égrène les réalisations, du « lycée Kyoto » aux importants fonds européens obtenus pour les énergies renouvelables. Les critiques portent davantage sur le style Royal. « Il n'y a pas de faille dans ses convictions écologiques, mais elle a un ego rarissime et tout le système est basé dessus », regrette Marie Legrand, qui, épuisée et défavorable au cumul dans le temps, ne brigue pas de mandat supplémentaire mais supporte la liste Europe Écologie.
« Créneau ténu »
La présidente de région peut alors vanter ses réussites, parfois à l'excès. « Première région photovoltaïque », répète-t-elle à l'envi. « Faux ! », vitupère Marie Legrand, plaçant le Poitou-Charentes au septième rang et relativisant l'intérêt du photovoltaïque, lui préférant la biomasse.
La droite part, elle, avec peu d'espoir. Dominique Bussereau, secrétaire d'État aux Transports, n'affiche pas d'enthousiasme excessif à l'idée de partir à l'assaut de l'hôtel de région. Il trouve surtout « rigolo d'affronter une star ». Peu amusante, sa comparaison des MoDem ralliés au PS avec les harkis risque de jouer contre lui, malgré sa rapide contrition. Le président du conseil général de Charente-Maritime semble se faire peu d'illusions et compte d'abord sur une désunion de la gauche. « Ségolène Royal attire tant d'inimitiés », souligne-t-il, tablant sur un « rejet dans son propre camp ». L'abstention à gauche permettrait à la droite d'entrevoir une chance. « Le créneau est ténu », reconnaît cependant Dominique Bussereau.
L'enjeu finalement dépasse la région. Le score de Ségolène Royal et la réussite ou l'échec de sa main tendue dès le premier tour infléchira son destin national. La candidate, sans cesse sur les routes, ne s'y trompe pas.
DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL MATTHIEU VERRIER
dimanche 14.02.2010, 05:04
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