7 novembre 2010

Quota imposé pour les femmes aux élections ..en Egypte

Evénement
Elections Législatives. Désormais, on ne pourra plus mettre les femmes à l’écart, un quota de 64 sièges leur est réservé au parlement. Un test autant pour les candidates que pour la société, en majorité conservatrice.
Une place à elle
Sur la route qui mène à la ville d’Aga dans le delta du Nil s’affichent des portraits et des slogans alors qu’officiellement, la campagne électorale ne débute que dans une semaine. Sabah fait le tour des petites maisons en briques rouges. Là où elle a pu, elle a peint son nom sur les façades. « Cela fait deux mois », raconte-t-elle. Un ouvrier passe chez les habitants qui « sont d’accord » pour écrire en rouge son nom complet. Prénom, prénom du père et nom, et à côté, un oui et le signe juste pour « la candidate au siège des femmes ». Parce que pour la première fois dans l’histoire de l’Egypte, les Egyptiens vont se diriger aux urnes pour le scrutin législatif pour élire, entre autres, 64 femmes, dans cette Egypte faite de moitié hommes, moitié femmes (49 % de la population sont des femmes, selon le dernier recensement officiel). Une loi votée l’an dernier par le Parlement, réservant ainsi ce nombre de sièges aux femmes aux côtés des 454 sièges classiques. Un quota à objectif « positif » pour augmenter le nombre des femmes à l’Assemblée du peuple qui, aujourd’hui, ne compte que 8 députées, dont seulement 2 élues.
L’expérience est tentante pour les partis politiques, à part le Parti National Démocrate (PND, au pouvoir), surtout pour récolter des sièges lors des élections qui tournent quasiment toujours en faveur du parti au pouvoir avec plus des trois-quarts des sièges. Le Wafd, le parti libéral et plus ancien du pays, avance ainsi 17 candidates, le Nassérien parle de 6 femmes, le Tagammoe de gauche compte sur 9 femmes sans compter des autres petits partis comme Al-Ghad et les indépendantes, dont un bon nombre de stars. C’est d’ailleurs le phénomène le plus marquant qui accompagne ce premier scrutin-femme. Des actrices, speakerines et jeune politiciennes éprouvent désormais une ambition pour réserver un siège procurant de l’immunité sous la voûte argentée au centre-ville (lire encadré page 4).
Concrètement, les électeurs devront élire de façon obligatoire deux femmes dans chaque gouvernorat, aux côtés des autres candidats, les deux sexes confondus, puisque les femmes pouvaient également se présenter avec les hommes sur les listes électorales. Et c’est le choix de beaucoup d’entre elles. Des femmes comme Gamila Ismaïl, ancienne épouse du candidat à la présidentielle de 2005 Aymane Nour, ou Amal Osmane, la plus ancienne député du PND, ont préféré entrer dans le « fair play » devant les hommes. Elles optent pour la candidature classique et non celle du quota. Ismaïl affronte ainsi un homme fort du parti au pouvoir dans la circonscription de Qasr Al-Nil, et Osmane devrait faire face à un énième combat devant les Frères musulmans (lire portrait page 5). Pour elles, le quota c’est pour les « nouvelles », celles qui se jettent pour la première fois dans la course électorale. Mais pour l’opposition, c’est un moyen de contourner la loi électorale en cours qui a abrogé le système électoral par « liste », optant pour le scrutin « individuel ». Un changement qui aurait contribué à ce recul de la femme et de son statut politique, liant son sort à une décision politique sur initiative personnelle du chef de l’Etat. Ce n’est que 5 ans après la Révolution de Juillet que les Egyptiennes avaient pu se porter candidates aux élections. Rawia Atteya était la première à oser défier les hommes sous l’impulsion du président Nasser. Et avant, le rôle de la femme était lié au mouvement nationaliste et à la lutte pour l’indépendance. « Ni élire, ni être élu », ainsi était-il. Aujourd’hui, le quota devrait changer la donne. Un système qui sera limité à deux scrutins législatifs, soit 10 ans.
« Un premier objectif est atteint », au moins c’est que croit un cadre du PND. Pour lui, les candidates et leurs partisans ont fait preuve d’activisme politique qui, dans certains cas, a dépassé celui des hommes.
Le cadre du parti au pouvoir parle de l’expérience de sa formation qui, la semaine dernière, a tenu dans toutes les villes principales des « congrès des gouvernorats » et à l’occasion un « scrutin interne », pour choisir entre toutes les femmes-PND espérant se retrouver sur la liste de leur parti.
Dans la salle de congrès de l’Université d’Al-Azhar, tous les préparatifs étaient en place. Gamal Moubarak, fils du président et chef du comité des politiques du parti, devait intervenir. Avant lui, c’est tout un processus électoral. Les femmes candidates au Caire passaient l’une après l’autre pour se présenter et essayer de convaincre leurs collègues au parti de voter pour elles. 3 minutes pour chacune, c’est tout. Devant la grille de l’entrée, la campagne battait son plein. Des partisans des candidates sont venus de différents coins de la capitale à bord de bus, privés et publics, affiches à la main, pancartes géantes, tracts et slogans à l’appui.
On chante le nom de la candidate et celui de son quartier. Plus de 3 heures passent, les supporters passent à la pause. Sandwichs et boissons, fournis par les futures députées, passent entre les mains. Une scène vouée à se répéter avec quelques différences dans les détails, le 28 novembre. Rendez-vous aux urnes, spéciales femmes. Ainsi veut le nouvel amendement apporté à la hâte à la loi de l’exercice politique. Un bulletin aussi pour voter femme séparément des autres bulletins et des urnes femmes. Une tâche gigantesque pour le ministère de l’Intérieur qui, d’ici le jour du vote, et en fonction de la modification de la juridiction, est obligé d’assurer le double du nombre prévu d’urnes.
Samar Al-Gamal

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