23 janvier 2010

Ségolène Royal la joue zen


Ségolène Royal a repris son bâton de pèlerin pour une nouvelle campagne électorale. A La Rochelle vendredi, elle a répondu très librement à l'interview Sud Ouest, prenant soin de ne pas évoquer 2012.
« Sud Ouest ». Vous voilà repartie en campagne. Sauf à dire que la dernière fois, c'était pour la présidentielle. L'ampleur n'était pas la même. À l'heure du démarrage, n'éprouvez-vous pas un sentiment bizarre ?
Ségolène Royal. Paradoxalement, non. Chaque campagne est unique. C'est toujours passionnant d'inventer des stratégies. C'est vrai que dans une présidentielle, on laisse une part de soi-même. En retour, on reçoit énormément. Moi, j'ai un tempérament assez modeste, mais si j'avais tendance à oublier ces moments, tout remonte quand je rencontre des gens dans la rue qui pleurent encore en me disant : « on était à Charléty ! » Avec une campagne régionale, c'est vrai qu'il y a une différence de taille, mais c'est la même exigence dans la qualité. En réalité, je suis plus à l'aise chez moi, sur un territoire que j'aime, que j'ai labouré dans tous les sens.
Un mot sur cette dimension nationale.
On vous sait très populaire. Pour autant, dans les sondages, on assiste à un envol de Dominique Strauss-Kahn et on vous voit à la peine. Vous considérez cela comme injuste ?
Je ne m'occupe pas de ça. Il y a un tel contraste entre les sondages et le contact populaire ! Les sondages sont une méthode d'un autre âge pour faire parler et faire vendre.
Vous n'en commandez pas ?
Je ne les regarde même pas.
Revenons aux régionales.
Avec votre politique d'« ouverture », vous êtes parvenue à poser beaucoup de problèmes chez les Verts, au Modem, au PCF, sans oublier le PS...
Ce ne sont pas des problèmes. Cela a suscité des débats. Ceux qui veulent se rassembler au premier tour sont en avance sur les appareils politiques et sont en phase avec ce que veulent les gens. C'est la clarté, l'union au premier tour. Est-ce que l'urgence de la crise économique, sociale, écologique, autorise de prendre le temps de se compter ? Non. On doit prendre le temps de travailler ensemble et d'élaborer un projet.
Je trouve triste qu'en 2010, des adultes responsables ne puissent pas dire à leurs appareils politiques qu'ils ont un point de vue différent en fonction des réalités du travail fait dans une région, ce qui n'est pas antinomique avec la dynamique nationale d'un parti.
Ceux qui vous rejoignent vont être exclus...
Suspendus. Et sitôt les élections, immédiatement réintégrés. C'est hypocrite. Digne d'une autre époque. Preuve d'un manque de maturité. Ces élus ont passé l'âge des punitions...
Vous n'êtes pas épargnée par vos adversaires... et suivie de près par le préfet de région. Que pensez-vous de cette offensive de l'État ?
S'il se bouge grâce à la campagne des régionales, c'est une bonne nouvelle ! Prenez l'exemple des États généraux de l'industrie. Pourquoi seulement maintenant ?
Les préfets passent, la République reste, la région continue à avancer. Je constate que cet acharnement choque même à droite.
Yannick Jadot, le député européen vert, vous a reproché, tout comme Jean-Pierre Raffarin, de vous laisser aller au « culte de la personnalité ». Que leur répondez-vous ?
Je réponds que c'est plutôt l'inverse. C'est la région qui bénéficie - et c'est tant mieux - de la notoriété que je lui donne. Lors de l'assemblée des régions du monde entier à Copenhague, tout le monde connaissait Poitou-Charentes. C'est un atout pour les acteurs économiques. Je donne ma notoriété, mon image, sans aucune réticence ! Je suis le VRP de la région...
On peut parler de la marque « Ségolène Royal » ?
D'une certaine façon, oui. Il y a une référence. Une façon de faire dans l'efficacité, dans l'enthousiasme, dans l'envie d'avancer. Je donne le maximum de ce que je peux donner.
Après avoir affronté Nicolas Sarkozy, vous êtes aujourd'hui face à Dominique Bussereau. Qu'en pensez-vous ?
Je ne fais aucune attaque personnelle contre les adversaires. Ils n'ont que cela à la bouche, c'est lamentable. Ce que je pense, c'est que lorsqu'on sollicite un mandat, il faut déjà en avoir envie. Ne pas y aller à contrecoeur. Il est ministre depuis 2002. J'ignore ce qu'il a laissé comme trace dans ses ministères. Il nous a dit récemment être à l'aise dans ses charentaises, ça veut dire qu'il n'a pas fait grand-chose. Il vient de nous annoncer une autoroute ferroviaire électrifiée devant être opérationnelle dès 2011 de Niort à Royan, via Saint-Jean-d'Angély et Saintes. Voilà longtemps qu'il a eu les transports en charge. Comment se fait-il qu'il n'ait pas mobilisé les moyens nécessaires à cette réalisation ? C'est très inquiétant ! Et ses autoroutes de la mer ? Elles sont où ? Ses promesses ne sont pas crédibles, depuis le temps qu'il est en responsabilité. Même chose pour les routes...
M. Bussereau, c'est aussi le ministre de la taxe carbone. Ceux qui sont pour peuvent voter pour lui ! C'est un scandale pour ceux qui ont besoin de leur véhicule pour aller travailler.
Moi, j'ai refusé d'augmenter la taxe sur les produits pétroliers, d'augmenter les impôts. M. Bussereau, ça fait envoyé de l'Élysée, revanchard, cumul des mandats.
Dans votre bilan, quel est le point le plus positif ?
La croissance verte ; le fait d'avoir anticipé la crise énergétique, d'avoir engagé l'après-pétrole.
Un point négatif, un regret ?
Un regret... Que pourrais-je dire...
Vous ne regrettez pas l'attitude que vous avez eue avec votre premier vice-président, Jean-François Fountaine ?
Chacun a pris ses responsabilités. Il y a eu débat autour du budget. Il y a une présidente. C'est moi qui avais à rendre compte... Cela n'empêche pas que Jean-François soit un homme de valeur, un grand chef d'entreprise. Je lui ai d'ailleurs proposé d'être sur la liste.
Martine Aubry vient d'évoquer le dossier des retraites...
Je ne souhaite pas aborder cette question en quelques mots. Martine Aubry a rectifié les choses pour qu'il n'y ait pas de malentendu. Les socialistes n'ont jamais été favorables à la remise en cause de la retraite à 60 ans.
À propos de vos listes, certains socialistes persifleurs espèrent que l'ouverture pourra se faire jusqu'au PS. Que leur répondez-vous ?
L'amertume est normale. Tout le monde ne peut pas être sur les listes. Mais tout le monde respecte le travail effectué à la région, il est fédérateur.
Si nous gagnons, il y aura le même nombre d'élus PS que pour le mandat précédent.
Dans l'optique du scrutin, vous êtes dans quel état d'esprit ?
Je ne suis pas du tout inquiète. Je suis tranquille.
Auteur : Propos recueillis par Christophe Galichon et Patrick Guilloton

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